Un jeu de dupes se déroule à l’Assemblée nationale togolaise. Un nouvel additif s’est agrégé au projet de loi du gouvernement portant réforme constitutionnelle. Alors qu’il avait paru ne pas céder sur le mode de scrutin, le gouvernement a introduit subrepticement une modification de l’article 60. L’article 60 ancien dispose que le scrutin est uninominal à un tour, le candidat élu étant celui qui a le plus grand nombre de voix.
Selon la nouvelle disposition :
L’élection présidentielle a lieu au cours d’un scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Le président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour du scrutin, il est procédé le quinzième jour à un second tour. Seuls peuvent se présenter au second tour les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix au premier tour. En cas de désistement ou de décès de l’un ou de l’autre candidat entre les deux tours, les suivants se présentent dans l’ordre de classement. Au second tour, est déclaré élu, le candidat qui a retenu le plus grand nombre de voix .
C’est donc le scrutin uninominal à deux tours que la majorité présidentielle vient de concéder, après l’avoir refusé depuis 2005. Cet article 60 nouveau, s’ajoute donc à la liste des articles 52, 59, 62, 79, 100 et 101 de la constitution du 14 octobre 1992 révisée le 31 décembre 2002, que porte le projet portant révision. Un enterrement de première classe qui semble quelque peu piégeux pour l’opposition. Cette provision intervient dans une atmosphère de rejet total par l’opposition du projet de loi portant réforme constitutionnelle.
En révisant cet article le 31 décembre 2002, le camp présidentiel voulait éviter à Eyadema le danger d’un second tour. Cela aurait pu être le cas lors de la présidentielle de juin 1998, où de sources officieuses, l’opposant Gilchrist Olympio était arrivé en tête de la présidentielle, avant que le processus ne soit interrompu de force.
En comptant sur la multiplicité des candidatures de l’opposition, la géopolitique et le vote ethno-tribal, le mode de scrutin à un tour constitue une garantie imparable pour le régime UNIR de remporter haut la main les élections présidentielles.
En voulant re-modifier l’article 60, ce n’est pas que le pouvoir a cru possible de gagner dans l’éventualité d’un second tour, puisque de toutes façons, lors des trois dernières présidentielles (2003, 2005,2010), le candidat du pouvoir a toujours remporté le scrutin avec plus des 2/3 des voix, c’est qu’il compte en réalité amener l’opposition à ne pas faire échec à la réforme.
Ne disposant pas de la majorité des 4/5, le pouvoir UNIR a la quasi certitude qu’elle aurait intérêt à adoucir quelque peu le cadre électoral pour que l’opposition puisse voter. La nouvelle disposition de l’article 60 nouveau étant l’une des exigences de l’opposition en ce qui concerne le cadre électoral.
Pressions occidentales
Reste à savoir si l’opposition suivra le pouvoir par cette pirouette. Ce n’est pas très sûr. Il s’agit d’un pari risqué : les exigences de l’opposition portent à la fois sur les réformes constitutionnelle et institutionnelle. Car, pour l’opposition, la seule réforme constitutionnelle ne suffit pas à assurer l’alternance. Il faudrait aussi que les réformes touchent les institutions du pays qui concourent ou interviennent directement dans l’organisation des élections. A savoir, la Commission nationale électorale indépendante, la Cour constitutionnelle, et la Haute autorité de l’audiovisuelle et de la communication (HAAC).
Un tel retournement des vestes de la part du pouvoir n’est pas fortuit. Le pouvoir a dû agir peut-être à l’instigation des chancelleries occidentales accréditées à Lomé. Les mêmes pressions seraient exercées notamment sur l’opposition pour l’amener à voter le projet de loi a minima.
Me Yawovi Agboyibo, Président d’honneur du CAR, est monté sur les médias pour prévenir une partie de l’opposition sur les risques de voter le projet de loi soumis à l’Assemblée nationale.
Le CST, pour sa part, organise une méga manifestation les 26 et 27 pour revendiquer les réformes constitutionnelle et institutionnelle. Difficile de savoir quel parti ou quelle alliance entre le parti et sa demme.
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