Développement : Le Togo chérit le rêve de gagner une aide non remboursable de 600 millions US

D’après la publication des indicateurs pays, le Togo peut entrevoir sous certaines conditions au moins le don d’essai de 35 à 40 millions dollars US du Millenium Challenge Corporation (MCC).

Le Millenium Challenge Corporation (MCC) est un fonds de développement bilatéral du gouvernement, qui accorde des financements (dons non remboursables) aux pays en voie de développement. Les pays sont généralement éligibles après satisfaction de 20 indicateurs en matière de  bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques,  de création d’un environnement favorable à l’initiative privée, et des investissements importants dans le secteur social. Grosso modo l’essentiel du toutim néolibéral dans les affaires.

Le MCC créé en 2004 offre deux programmes dont le compact portant sur une enveloppe de 600 millions dollars US  sur une période de 5 ans, et un programme de seuil de 40 millions dollars US sur une période 2 à 3 ans. Pour ce dernier, il faut satisfaire un seuil d’éligibilité.

Cela fait plus de 15 ans que le gouvernement togolais mène une course folle pour être éligible au MCC. Si les années précédentes, il y a loin de la coupe aux lèvres, cette fois-ci l’espoir de trinquer pourrait être envisagé.

Et pour cause : dans le dernier rapport du Millenium Challenge Corporation sur les indicateurs pays, le Togo satisfait 15 des 20 conditions d’éligibilité au programme. Le pays est parfaitement éligible pour le programme de seuil.

Ainsi, sur le plan de la liberté d’entreprise, le pays obtient de bons scores en politique fiscale, genre en économie, accès au crédit, politique commerciale, en business start-up, et au droit d’accès à la terre. De même sur le plan des lois et règlements, le pays est bien noté en matière d’Etat de droit, des libertés civiles, du contrôle de la corruption, et de la liberté d’accès à l’information. On retrouve la même notation de satisfaction dans la catégorie « Investissements sociaux ». De bonnes notes en « dépenses pour l’éducation primaire », « dépenses pour l’éducation des filles », et la protection de l’environnement.

Les réformes comme le nouveau code foncier, le guichet unique dans le secteur foncier, ainsi que l’ouverture de Togocom aux capitaux privés dans le secteur des communications, ont favorisé cette notation.

Cependant, le pays est épinglé sur les indicateurs concernant les droits politiques, l’efficacité de l’administration publique et les dépenses liées à la santé, le taux de vaccination et la santé infantile.

Le déni de démocratie par des élections frauduleuses, les lois liberticides sur les libertés publiques, la médiocrité de l’administration d’une façon générale (sous-équipement et lourdeur administrative), l’état catastrophique des infrastructures sanitaires publiques sont rédhibitoires pour faire gagner le point complet au Togo et assurer son éligibilité.

Le chef de l’Etat togolais se félicite du petit pas réalisé par le Togo. « Cette performance est le fruit des nombreuses réformes entreprises dans plusieurs secteurs et tout particulièrement dans le domaine de la gouvernance, de la liberté économique et de l’investissement dans le capital humain. », écrit-il sur sa page Facebook.  

Programme de seuil de 40 millions dollars US

L’euphorie semble même gagnée tout le gouvernement qui rêve en grand… espoirs chimériques d’un gouvernement qui peine à définir une vraie politique de développement et s’accroche aux aides bilatérales conditionnelles.

Republicoftogo titre « Le Compact pour bientôt » exprimant parfaitement le rêve du gouvernement togolais de gagner rapidement le jackpot des 600 millions dollars US de financement non-remboursable.

Cependant, le gouvernement devrait plutôt revoir ses ambitions à la baisse et peut-être chérir son éligibilité au don d’essai de 40 millions destiné à encourager certains pays à aller un peu plus loin dans les réformes plus hardies comme les lois politiques, l’efficacité du gouvernement et les investissements sociaux.

« Le régime n’est préoccupé que par le compact. Le fait de ne pas passer l’indicateur sur les droits politiques rendra un compact difficile à justifier », déclare au Temps un expert des relations internationales.

En plus, note cet expert, « certains pays ont commencé directement avec le gros lot (le Compact)  parce qu’ils ont une longue tradition de transparence et de redevabilité, donc leurs structures de gouvernance permettent des réformes assez rapides ». Ce n’est pas malheureusement pas le cas du Togo qui accumule les preuves de mauvaise gouvernance, en dépit d’une avancée remarquable dans les indicateurs de «Doing Business» destinés à favoriser les Investissements directs à l’étranger (IDE).

Des notes en trompe-l’œil

Le MCC a aidé bien des pays à l’instar de la Côte d’Ivoire dont l’économie a été boostée par cette aide sous Ouattara. Mais encore faut-il avoir un bon environnement et d’ambitieux projets de développement. Ce qui n’est pas le cas du Togo dont les différents plans de développement, chaque fois retoqués ou relookés,  ont fait chou blanc depuis l’arrivée de Faure Gnassingbe en 2005.

Par conséquent la grande question reste que fera le Togo des 35 millions de dollars .

 Par conLes indicateurs d’éligibilité au MCC sont ceux du gouvernement américain pour établir un minimum de démocratie et de liberté dans les affaires. Mais, de but en blanc, certaines notes semblent ne pas refléter la réalité. Certains indicateurs viennent directement de la Banque mondiale ou du FMI, où prévaut un certain laxisme dans la collecte des informations, on l’a vu tout récemment avec le scandale de la notation du Doing Business.  

L’accès au crédit par exemple est un parcours du combattant pour les personnes désireuses d’appui financier pour faire des affaires. La plupart des banques togolaises sont des banques de dépôt et leurs conditions de prêt sont parmi les plus difficiles. Et pourtant le Togo y est bien noté. Il en est de même du contrôle de la corruption. Un organisme de lutte contre la corruption  qui a épinglé dans son rapport 2019 les forces de l’ordre et surtout la gendarmerie, a modifié du jour au lendemain ledit rapport en faveur des forces épinglées. La faiblesse des organes de contrôle de la corruption comme la justice face aux pouvoirs politiques discréditent ces notations.


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A propos Komi Dovlovi 1093 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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