La défaillance du système hospitalier entraîne le manque de vigilance des médecins qui laissent passer sous le radar des cas patents de covid-19, mettant en danger à la fois le personnel soignant et des patients d’autres pathologies.
Le 30 avril dernier, le site du gouvernement dédié au Covid-19 déclarait 6 nouveaux cas positifs à Dapaong et dans la foulée le décès de deux enfants. Il s’agit d’un enfant de 13 mois et d’un autre de 10 ans. Les cas se répartissent entre la ville de Dapaong et Cinkassé. La capitale de la Savane enregistre 4.
- Une fille de 2ans, Togolaise résidant à Dapaong qui était un cas suspect ;
- Un nourrisson de 13 mois, Togolaise résidant à Dapaong, qui était un cas suspect ;
- Un garçon de 10 ans, Togolais résidant à Dapaong qui était un cas suspect ;
- Une femme de 22 ans, Togolaise résidant à Dapaong qui était un cas suspect.
Les deux villes présentent la particularité d’être les derniers points de l’arrière-pays sur la nationale N°1 pour atteindre le Burkina. Route commerciale et partant beaucoup de rencontres.
Mais derrière la nouvelle surprenante et inquiétante des 6 cas dans une région dévastée, il y a un grand scandale médical. Exactement la même chose qui s’est produite en avril au CHU Sylvanus Olympio de Lomé entre le 10 et le 14 avril.
De quoi s’agit-il ? Les 4 cas ont été reçus au CHR de Dapaong pendant huit jours. Ils présentaient des maladies d’ordre respiratoire. Et pendant les huit jours, les patients n’ont rencontré aucun médecin.
Or, il s’agit manifestement de cas de malades présentant les symptômes du nouveau coronavirus. Les malades sont admis en salle commune tandis que les trois enfants sont en pédiatrie. Pendant huit jours. C’est aux termes des huit jours, avec finalement le décès de deux enfants que les patients ont été pris en charge et testés. Les malades ont eu le temps de mettre en danger à la fois le personnel soignant et les autres malades.
Selon un médecin proche du CHR, des membres du personnel soignant ont été mis en isolement ainsi que des malades et les proches des patients admis en salle commune.
Un cas similaire s’est produit au CHU Sylvanus Olympio de Lomé le 10 avril dernier. Deux patientes se sont présentées au CHU S.0 le vendredi 10 avril et n’ont été prises en charge que mardi 14 avril. Elles décéderont le 15 avril lors de leur transfert au CHR de Lomé Commune, centre dédié au traitement du Covid. Plus de 15 membres du personnel soignant ont été mis en isolement sans compter les patients qui ont été dans la même salle.
Adopter une stratégie de test systématique, dit un médecin du CHU
Après le scandale du CHU S.O, le colonel Djibril, coordonnateur national de la lutte contre Covid-19 et le directeur du CHU S.0 ont annoncé de nouvelles mesures pour éviter à l’avenir de telles fautes médicales.
Cependant, le constat est là : aucune mesure n’est prise et aucun protocole cohérent quant à la mise à jour de la prise en charge des patients présentant des pathologies d’ordre respiratoire en pleine crise de covid-19. Plus grave, les structures sanitaires ne sont pas dotés des moyens conséquents pour faire face à l’urgence sanitaire.
Le professeur Ihou Wateba, qui pilote la lutte au niveau du système hospitalier, se contente de faire des grandes déclarations et des coupes claires dans le personnel soignant.
35 membres du personnel soignant du CHR Lomé Commune ont été renvoyés par lui et remplacés au pied levé par des infirmiers militaires moins regardant sur les questions de conditions et de de primes de travail.
Le Temps a contacté un médecin travaillant au CHR Lomé Commune, qui déclare, sous anonymat, que la lutte est perdue si on ne change pas de politique.
“Il est clair que le virus s’est propagé s’est à présent installé. Les mesures urgentes que nous avons prises au début de l’état d’urgence sanitaire sont à présent caduques. Que ce soit à Lomé ou à Dapaong, nous avons failli et avons laissé propager le virus à cause de nos fautes”, déclare-t-il.
La fermeture des frontières s’est révélée un leurre. Certes, c’est l’Afrique, et les frontières sont poreuses. Mais le Ghana a laissé entrer sur le territoire national 6 patients malades du Covid-19 dès après le déconfinement alors qu’officiellement le Togo n’a pas encore ouvert les frontières. Ce n’est pas nos services qui ont testé les 6 patients de Djarkpanga. C’est le Ghana et ce sont leurs services qui nous ont alertés, ajoute encore ce médecin
Pour lui, il faut changer de stratégie. Et ce, très vite.
Au lieu de tester uniquement les cas suspects et dépister leurs contacts, il faut adopter une politique de test systématique. On croyait avoir maîtrise sur la situation, mais ça part en vrille. Il faut tester.
Le Togo fait très peu de tests. Jusqu’au 4 mai, l’Institut national d’Hygiène n’a réalisé que 7.891 tests, contre plus de 150 mille pour le Ghana. Il est temps de changer de méthode.
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