Soudan : Sous pression, les militaires demandent un retour à la table des négociations

48 heures après la sauvage répression du sit-in qui a fait plusieurs dizaines de morts à Khartoum,  la junte militaire lance un appel aux civils pour des négociations sans conditions.

La crise soudanaise connaît un incroyable rebondissement ce mercredi 5 juin quand le chef de la junte au pouvoir, Abdel Fatah al-Burhan annonce dans une déclaration que le Conseil militaire demande la reprise des négociations sans délai avec les civils de l’Association des professionnels, fer de lance des manifestations populaires qui jalonnent le pays depuis le 19 décembre 2019. Sans expliquer la raison de ce revirement, l’officier a déclaré que le Conseil militaire était « prêt à ouvrir ses bras au dialogue avec toutes les parties, dans l’intérêt du pays »

Cet appel intervient après la campagne de répression du sit-in dans la capitale dont le lourd bilan est estimé ce mercredi à plus de 100 morts et plusieurs dizaines de blessés. Et surtout après que le général Abdel Fatah al-Burhan a mis fin brutalement aux négociations avec les civils, annonçant du coup les élections dans 9 mois.

Pour le moment aucune information quant aux raisons du revirement soudain des militaires. Rfi évoque des pressions américaines, un appel de Tibor Nagy, le sous-secrétaire d’Etat américain aux affaires africaines à l’Arabie Saoudite, soutien de la junte au pouvoir.

On sait que  la volonté d’une restauration militaire a été décidée peu après le retour d’Egypte et d’Arabie Saoudite du général Abdel Fatah al-Burhan et le numéro 2 de la junte, Hemmeti, le chef de la milice paramilitaire.

L’Arabie saoudite a peur de voir s’installer dans sa zone d’influence une république laïque, démocratique et multiculturelle telle qu’elle se dessine dans le projet  de l’Association des professionnels soudains. Un tel projet de société dans une société islamique menacerait la stabilité du régime des  Al Saoud basé sur la charia et un autoritarisme des plus violents et rétrogrades au monde. Les Saoudiens craignent également les civils qui exigent le retrait du Soudan de la coalition anti-terroriste en guerre au Yemen.

Pressions occidentales

Les vives condamnations par l’Union Européenne et les Etats-Unis des violences militaires et les risques d’un chaos qui pourraient destabiliser le pays voire la région, ont peut-être dissuadé les militaires de revoir leur ambition de restauration à la baisse.

Le Soudan vit une crise depuis le 19 décembre, date du déclenchement de manifestations populaires contre le renchérissement des produits. Les manifestations ont conduit à la démission du président-général Omar El Béchir, déposé par l’armée, après plus de 30 ans au pouvoir. L’Association des professionnels, ensemble des organisations de la société civile en lutte contre la dictature islamo-militaire exige une transition de trois ans dirigé par un régime civil. Ils se heurtent à l’opposition conservatrice des militaires désireuse de garder le pouvoir et de rétablir un régime fondé sur la charia, la loi islamique.


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A propos Komi Dovlovi 1098 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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