Sur fond d’une volonté nationale affichée de reprise en main de la production des ressources minières, l’uranium nigérien connaît des bisbilles entre le gouvernement nigérien et la société française Orano.
Le 31 octobre 2024, Orano annonce sans surprise la suspension de sa production sur le site d’Arlit, dans le nord du Niger. La société française évoque des «difficultés financières», contrecoup de la fermeture de la frontière du Niger avec le Bénin depuis le putsch de juillet 2023. La société n’arrive plus à exporter sa production via le port de Cotonou, et affirme disposer en stock 1050 tonnes de concentré d’uranium pour une valeur marchande estimée à « 300 millions d’euros ».
La junte nigérienne conteste la suspension en avançant que la Sopanim, «la société coactionnaire n’a pas été consultée sur cette décision grave». La Sopamin, actionnaire étatique à 36,66 % de Somaïr, dénonce un «manque de transparence » et la « violation de principes et pratiques essentiels à la gouvernance, aux engagements entre les parties prenantes ».
La décision portant suspension des activités de production avait pourtant été prise au cours d’un conseil d’administration qui a eu le 23 octobre 2023.
La Somaïr avait connu une première suspension des activités entre septembre 2023 et février 2024, à la suite de laquelle le Niger a retiré le permis d’exploitation du gisement d’Imouraren.
Cette mine d’une superficie de plus de 240 km2, est l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, avec des réserves estimées à 200 000 tonnes.
Regain nationaliste et volonté d’accroître les recettes fiscales
Si le conflit se décline sur fond des oppositions sous-jacentes entre le pouvoir militaire et le gouvernement français, soutien du président déchu Mohamed Bazoum, il n’en demeure pas moins une volonté affichée des nouvelles autorités de contrôler plus les ressources minières et d’accroire ainsi les recettes fiscales.
Orano n’est d’ailleurs pas la seule entreprise à passer sous les fourches caudines de la junte de Niamey. Ainsi le Niger a retiré au groupe canadien GoviEx (Govi High-Power Exploration) le permis d’exploitation d’un important gisement d’uranium à Madaouéla, près d’Arlit (Nord), en juillet 2024.
Malgré l’annonce de GoviEx de porter le retrait du permis devant les juridictions internationales ad hoc, la volonté des Nigériens se matérialise en septembre par deux communications sur la création de deux nouvelles entreprises nationales d’exploitation de l’or et de l’uranium.
La Mazoumawa National Gold Company gérera l’exploitation de l’or nigérien, encore à l’état d’exploitation artisanale, alors que la société nationale d’exploitation de l’uranium sera annoncée prochainement.
La démarche du Niger abonde dans le même sens que les décisions du Burkina Faso et du Mali, les autres deux pays membres de l’Alliance des Etats du Sahel, d’où se dégagent le bruit et la fureur d’un néo-souverainisme et d’un néo-panafricanisme.
Cependant, ces initiatives ne sont pas nouvelles dans l’histoire de l’exploitation des ressources minières en Afrique. Certains pays sont d’ailleurs passés par des phases de nationalisation, mais au bout de certaines les initiatives n’ont pas montré une meilleure efficacité , et leurs destins ont été plombés par la corruption et la mauvaise gestion.
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