La campagne électorale prend fin ce samedi à minuit. Partis politiques et candidats indépendants ont fait des pieds et des mains pour mobiliser l’électorat. Mais à ce jeu ludique d’un système démocratique où on devrait se battre à armes égales, le parti au pouvoir prend le dessus. Le parti mobilise l’administration et les dépenses de campagne pourraient largement dépasser le plafond fixé par le code électoral.
Maigre financement public de la campagne
Un pactole pour les partis politiques. De l’argent frais pour les candidats… Les journaux ne tarissent pas d’imagination pour évoquer le financement des législatives et régionales par l’État. Le 15 avril 2024, le ministre de l’administration annonce la mise à disposition des candidats d’une somme de 650 millions dans la cadre de l’aide publique pour le financement des activités politiques et des campagnes électorales.
Selon le communiqué, il s’agit de 325 millions de francs CFA pour les législatives et autant pour les régionales. Et suivant les modalités, une partie (65%) de ces montants sera répartie à parts égales entre toutes les listes de candidats. Le reste est réservé aux meilleurs candidats. « 35 % du montant de la contribution de l’État sont repartis proportionnellement aux suffrages obtenus, entre les listes ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés », précise le communiqué.
Il y aurait en tout 353 listes. En s’essayant un peu aux mathématiques, c’est la somme de 211.250.000 FCFA qui sera répartie entre les 353 listes. Ce qui représente 598.442 FCFA pour chaque liste. Sans commentaire !
Pour que les candidatures soient définitivement acceptées, il faut que chaque candidat verse 300 milles FCFA de cautionnement. « Le montant du cautionnement à verser au trésor public par les candidats aux élections législatives et régionales de 2024 est fixé comme suit : – pour les candidats aux élections législatives : trois cent mille (300.000) francs CFA par candidat ; – pour les candidats aux élections régionales : cent cinquante mille (150.000) francs CFA par candidat », lit-on dans le décret N°2024-019/PR du 23/02/2024. Dans un précédent décret, le cautionnement est fixé à 500 milles FCFA.
Pour les législatives, le cautionnement fait la moitié du financement public de la campagne électorale. Cette situation lèse une grande majorité de candidats et fausse le jeu électoral. Pire, cela favorise le parti au pouvoir qui en profite pour surclasser ses adversaires en termes de dépenses.
Les candidats UNIR violent le plafonnement des dépenses
Il y a quelques jours, nous sommes tombés sur une vidéo montrant des jeunes habillés à l’effigie de UNIR dans une caravane. Dans la vidéo, on entend une voix dire clairement à ces jeunes que ceux qui ne vont pas afficher une bonne mine ne vont pas recevoir de per diem à la fin de la caravane. C’est le propre du parti UNIR que d’exploiter la précarité des jeunes pour faire croire à une forte mobilisation derrière le parti. A coup de millions de FCFA, on paie les jeunes et on les transporte de lieux en lieux pour gonfler les foules.
Mais pas seulement. Dans les dépenses de la campagne, le régime est champion. Des millions de T-shirt, casquettes et autres gadgets sont imprimés. Des milliers de yards de pagnes sont distribués par les candidats. Les véhicules de fonction sont mis à disposition avec des bons de carburant. Même le préservatif à l’effigie du parti est disponible, comme pour réaffirmer que le président du parti est un célibataire.
On imagine que ce sont des milliards probablement issus des détournements des deniers publics qui servent à mobiliser l’électorat UNIR. L’argent détourné des caisses de l’État sert toujours la cause du régime. Raison pour laquelle personne n’est inquiétée quand il s’agit de siphonner les deniers publics.
Mais en engageant de si lourdes dépenses, le parti au pouvoir viole les dispositions du Code électoral qui fixent le plafonnement des dépenses de campagne.
L’article 132 stipule : « Les dépenses engagées par les partis, les regroupements de partis politiques et les candidats indépendants durant la campagne électorale sont à leur charge. Il est interdit à tout parti politique ou à tout candidat à une élection législative ou présidentielle d’engager pour la campagne électorale plus de trois millions (3.000.000) de franc CFA de dépenses par candidat pour les élections législatives et plus de cinquante millions (50.000.000) de francs CFA pour les élections présidentielles ».
L’article suivant fait obligation aux candidats d’établir des comptes de campagne. Se sachant fautif et pour éviter de se retrouver pris à son propre piège, le régime ferme les yeux sur ces dispositions.
Jean-Baptiste Edina
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