L’ambassadeur de France Marc Vizy fait suspendre deux journaux togolais

Marc Vizy, Ambassadeur de France au Togo

La Haac vient de condamner, respectivement, à deux mois et deux semaines de suspension, le bi-hebdomadaire L’Alternative et le quotidien Liberté, suite à une plainte l’ambassadeur de France au Togo, Marc Vizy, pour « diffamation » et « atteinte à l’honneur ». Il s’agit d’une décision liberticide, inique et scandaleuse, qui porte le sceau du néocolonialisme macronien décomplexé. Sous prétexte d’obéir aux injonctions de l’ambassadeur français, la Haac, un organe constitutionnel inféodé au pouvoir en place, musèle les deux journaux les plus critiques de l’espace médiatique togolais.

En guise de solidarité à nos confrères, et refusant que le Togo soit une serpillière de la France macronienne, Le Temps en ligne publie les articles incriminés par la Haac. Voici ci-dessous le minuscule article du quotidien Liberté qui fait pousser des cris d’orfraie au vizir de l’Elysée au Togo.

Diplomatie

Marc Vizy, l’autre ennemi de la démocratie au Togo

Si le Togo est toujours dans la situation actuelle, c’est en partie la faute aux diplomaties occidentales, particulièrement la France. Depuis son arrivée au Togo en septembre 2017, au temps fort des manifestations contre Faure Gnassingbé, Marc Vizy s’est opposé à toute démarche de son pays en faveur du peuple togolais. Pour lui, la crise qui secoue le Togo n’est rien de grave. « Ce sont des turbulences politiques souvent exagérées par les médias », aime-t-il rapporter, pris sous le joug des mallettes.  

Le mercredi 26 février dernier, les Etats-Unis ont réagi par rapport à la tenue du scrutin du 22 février 2020. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le communiqué publié par l’ambassade est une première dans l’histoire du Togo. Et pour cause, depuis des décennies, les diplomaties occidentales se sont toujours rangées du côté de l’oppresseur. Après chaque scrutin, elles se concertent et publient une déclaration dans laquelle le caractère pacifique de l’élection est salué et les fraudes massives organisées par le régime réduites à de petits événements sans incidence majeure.

Minimiser la crise togolaise. C’est en effet ce qu’ont toujours fait les diplomates occidentaux dont celui de la France. En effet, depuis son arrivée en septembre 2017, l’ambassadeur de France au Togo, Marc Vizy s’est toujours comporté comme si le Togo n’avait aucun déficit démocratique et que chacune des institutions jouait véritablement son rôle. Selon des sources diplomatiques crédibles, le diplomate a toujours minimisé la crise sociopolitique qui secoue le pays. Et ce n’est pas pour mentir dans son compte. D’ailleurs, nous l’avions relevé dans notre parution N°2673 du mardi 15 mai 2018. Dans un article intitulé : « L’ambassadeur Marc Vizy minimise la crise togolaise », nous avons rapporté les propos qu’il a tenus devant un parterre de journalistes et d’hommes d’affaires, quelques mois seulement après son arrivée au Togo. C’était à l’occasion de l’inauguration d’un nouvel entrepôt par AGS, une entreprise française. « Le Togo connaît quelques turbulences politiques souvent un peu exagérées par les médias (…) Nous sommes convaincus que cet épisode de turbulences politiques, les Togolais sauront le dépasser dans un cadre pacifique, dans le cadre de la démocratie. Nous avons confiance. Si certains doutent, nous, nous ne doutons pas », avait-il osé.

En vérité, c’est le même discours qu’il tient quand il est interpellé sur la situation sociopolitique au Togo. Ses comptes-rendus, selon nos sources sont de fausses informations qui conduisent la diplomatie de son pays à ne pas se préoccuper de ce qui se passe dans la dictature des Gnassingbé. « Quand le Quai d’Orsay lui demande des rapports, il minimise la situation et dit toujours que ce n’est rien de grave », assurent nos sources. Pour Marc Vizy, ce sont les médias qui exagèrent les turbulences politiques.  

Pourquoi l’ambassadeur met-il sa diplomatie au service de Faure Gnassingbé et la dictature qu’il tente de perpétuer ? « Pour des intérêts personnels », assurent nos sources. En d’autres termes, le diplomate est en service commandé, à l’image d’un mercenaire. Pour les générosités (sic) dont il jouit régulièrement du régime, il se range du côté de la dictature. Pour lui, l’argent a plus de valeur que la libération du peuple togolais tout entier. Et à défaut de dire que tout va bien, Marc Vizy se tait. C’est du moins le constat fait depuis la proclamation des résultats frauduleux par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Outre la déclaration de l’ambassadeur des USA, c’est le silence radio chez les autres diplomates du G5, notamment la France, l’Allemagne, la Délégation de l’Union Européenne et le Système des Nations Unies. Tous ont, jusque-là, gardé le silence. Et ce n’est pas fortuit.

En effet, après la proclamation des résultats, les 5 diplomaties se sont réunies pour une position commune à adopter. Certaines chancelleries ont milité pour que les lignes bougent et que les Togolais ressentent un peu l’air de la démocratie. Finalement, le schéma adopté lors de cette concertation est de saluer le caractère pacifique du processus et demander aux candidats de suivre les voies légales de recours en cas de contestation des résultats. S’en suivront les messages de félicitation et le tour est joué. Rendez-vous sera donné sur 2025 pour une autre élection et des contestations étouffées.

Heureusement, et il faut le saluer, les Etats-Unis ont pris la décision de défendre la démocratie et non leurs intérêts. C’est ce qui a bloqué la France, l’Allemagne et leurs complices qui se sont murés dans un silence assourdissant. Et pourtant, Marc Vizy ne risque rien à parler et à dire la vérité aux gouvernants. Dans 5 mois, soit en août 2020, il sera à la fin de son séjour au Togo. Il a le temps de se rattraper et soutenir le peuple togolais dans sa marche vers la démocratie.

G.A.


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A propos Komi Dovlovi 1121 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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