La Haac a pris des précautions langagières pour dénoncer l’agression du journaliste Robert Avotor, mais en vérité Pitang Tchalla s’en moque.
Le président de la Haute autorité de l’audiovisuelle et de la communication, Pitang Tchalla, a des tours de passe passe digne d’un clown de cirque. Il produit un communiqué (communique_haac_affaire-robert-avotor) pour dénoncer le passage à tabac du reporter battu d’Alternative, mais les éléments de langage montrent en réalité que le président de l’institution n’est guère préoccupé par les violences et voies de fait perpétrées par des gendarmes togolais.
Le scepticisme est l’apanage des esprits profonds. Si Montaigne met le doute systématique au service de sa quête de la connaissance, tel n’est pas le cas de Pitang Tchalla, le président de la Haac, qui l’érige pour montrer sa mauvaise foi.
Le 10 février dernier, la Haac montre patte blanche en publiant un communiqué concernant l’agression du journaliste, Robert Avotor, par des gendarmes en mission dans un village de la préfecture du Golfe.
« La Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication aurait appris par la presse, l’information qu’un journaliste [aurait été empêché] de faire son travail puis torturé », indique l’institution de réglementation. L’utilisation du conditionnel montre le doute de la Haac quant à la vérité de cette information par la [presse]. Le président de la Haac n’a pas eu l’idée d’aller constater de visu les « tortures » infligées au reporter du bi-hebdomadaire L’Alternative.
La situation pourtant « l’intrigue ». Et si tout cela relevait de l’imagination débordant du Journal L’Alternative? Et si Robert Avotor était un torturé imaginaire ?
« Intrigué », Pitang Tchala a donc a appelé le ministre de la Sécurité et de la Protection civile ainsi que le Directeur de la gendarmerie nationale pour connaître de cet « incident grave ».
Mais, même après avoir pris contact avec ces hauts responsables de la sécurité au Togo, le président de la Haac n’a apparemment pas eu les informations concernant l’agression d’un journaliste par des gendarmes.
Résultat : du doute, Pitang Tchalla est passé à la négation au point de faire un jugement de Salomon et renvoyer dos à dos la victime et ses bourreaux.
Pitang Tchalla ne dénonce pas, il approuve
« En attendant [Quoi ?], la Haac condamne sans équivoque toutes formes de violence physique, morale, verbale et éditoriale, et appelle tous les acteurs et protagonistes à œuvrer à l’apaisement par le respect des règles qui régissent la profession et d’éviter toutes escalades et surenchères », conclut le président de la Haac.
On notera les éléments de langage utilisés : De victime, le journaliste Robert Avotor est passé à bourreau ; d’agressé à agresseur ; et finalement il ne serait malencontreusement que la victime de la ligne éditoriale critique du journal Alternative. Un bouc-émissaire de la plume acérée d’un journal fouineur !
Et cerise sur le gâteau d’un communiqué qui va rester dans les annales de la tartuferie, ou un gimmick de cette Haac, Pitang Tchalla ne signe pas son forfait. Il s’en lave presque les mains. C’est Ponce Pilate envoyant Jesus sur la croix tout en se défaussant de cette responsabilité. Qui pourra l’incriminer au cas où un étudiant ferait une thèse sur les comportements des présidents de la Haac ?
Certes, il est plus facile pour le président de la Haac de répartir les enveloppes contenant des dons en espèces du chef de l’Etat destinés à des journalistes véreux que de condamner l’agression d’un journaliste dans l’exercice de ses fonctions par des gendarmes censés lui assurer protection.
Le métier d’intendant de Faure Gnassingbé est plus aisé que celui de diriger une haute institution de la République censée incarner la liberté de presse, l’un des symboles de la démocratie.
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