Musique: King Mensah fête les 20 ans de sa carrière à huis clos

20 ans de carrière musicale pour King Mensah ; on croirait l’écouter depuis 50 ans, tellement on s’en est lassé !

Considéré il y a quelques années comme le roi de la musique traditionnelle, couronné par deux Koras (2000 et 2004)- plus grande reconnaissance qu’un artiste africain peut espérer en Afrique subsaharienne-, King Mensah célèbre 20 ans de sa carrière ce samedi 10 décembre à l’Hôtel Sarakawa.

Ce sera un concert-live VIP pour la modique somme de 20.000 CFA. Un entre-soi donc pour la petite bourgeoisie et les nouveaux riches de Lomé.

Les mauvaises pensées pourraient vite conclure à une détestation des pauvres par le King. Loin de là. Le roi de la musique traditionnelle aime les pauvres, la preuve il a une fondation qui s’occupe des orphelins.

Artiste en déclin

L’ennui est ailleurs : King Mensah n’est plus vraiment le roi de l’afro-funk, une espèce de musique traditionnelle mangée à la sauce de la modernité qui a tant enchanté le jury des Kora Awards au point de lui attribuer deux trophées en l’espace de quatre ans. Les albums Madjo (1996), Edidodo (1998), Mensah Mensah (2000) et dans une moindre mesure Elom (2002) constituent révélation et confirmation d’un artiste en devenir. Et cette patte de l’école Ki-Yi de l’ivoiro-camerounaise qui lui a montré qu’on pouvait modeler et remodeler la pâte de la tradition.

Cette tessiture de la voix, son a cappela envoûtant, cette somme des rythmes voyageant à travers l’agbadja, l’akpessé, le kamou du pays  ne transportent plus les foules. Et pourtant, il avait créé l’émulation. Une floppée d’artistes avaient commencé à le singer, cette imitation servile n’est pas prête de s’éteindre, tant le pays, un éteignoir  meurtrier des talents, interdit la création mais promeut la copie pale, imitation servile.

Témoin de ce déclin, même le public, par faute goût peut-être, ne le suit plus. Il y a cinq ans, il remplissait le Stade de Kégué en faisant  le double de sa capacité (30.000 places) au point de susciter des sueurs froides à la sécurité. Mais depuis ce record mémorable, le King est sur une pente déclive. La glissante inexorable. King Glissant ! Aujourd’hui, il pourrait à peine remplir le quart de ce même Stade de Kégué.

Un concert-live VIP dans un huis clos à l’Hôtel Sarakawa- un lieu tout aussi en déclin –  pour les nouveaux riches du pays, un entre-soi entre petites gens qui s’apprécient pour le pays qu’ils délitent de leurs petites prédations ou de leur inconsciente alliance avec les prédateurs, bref des gens sortis tout droit du Jardin des délices de Jérôme Bosch.

Artiste officiel

King Mensah ne se fait aucune illusion sur la populace depuis qu’il est perçu comme l’artiste officiel des Gnassingbe, les Gnassingbe de père en fils, non de fille en fils, au point de s’accoutrer de pieds en cape dans les couleurs UNIR pour faire la fête avec la ministre du Développement à la base, celle qui distribue comme de petits pains des clopinettes pour soi-disant colmater, à travers des projets farfelus, la misère crasse créée par leur manque de vision d’un pays et de son développement.

Dommage le King, les vapes de la célébrité  embrunissent son talent, sa voix, patraque. Deux ou trois premiers albums et puis c’est tout. La suite est navrante. Paresse intellectuelle, embourgeoisement, et cette foi un peu bébête d’être béni des Dieux qu’il divulgue à longueur de chansons.

Il s’est essayé à d’autres genres, y compris le reggae. Mais quand ça ne va pas, rien à faire. C’est mort. N’est pas Bob Marley qui veut, surtout pas avec cette musique un peu “life is life” dans un pays qui oublie l’environnement concentrationnaire et les morts par balles dès qu’une urne se pointe. Et il chante Dieu à tous les coups ! Les quatre derniers albums de sa discographie ? Allez chercher sur www.masturbat.com !

Dommage, le King Mensah ! Un gâchis quand on pense qu’il est arrivé 23 années après Bella Bello… que l’on croyait à une renaissance de cette musique nationale qui n’a pas de chance…

Naissance: 12 août 1971

Ecole: Ki-Yi de Wèrèwèrè Liking.

Discographie

Madjo (1996)
Edidodo (1998)
Mensah Mensah (2000)
Elom (2002)
Yetonam (2008)
Da (2012)
Soke (2014)

 

 

 

 


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A propos Komi Dovlovi 1102 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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