Le Ministre de l’Economie et des Finances, Monsieur Adji Otèth Ayassor vient d’être démis par celui qui l’a porté à la tête de ce ministère depuis 2007. Sa longévité à ce poste- plus longue durée dans l’histoire du Togo- est telle que nombre de ses détracteurs ont fini par se faire une religion sur son inamovibilité. C’est donc avec surprise que la nouvelle est tombée ce soir au journal de 20 heures: l’inamovible est limogé. Il est remplacé par son ministre du Budget.
Ce limogeage intervient dans un contexte sulfureux pour le gouvernement dont certains hauts responsables de l’Etat, le Premier ministre Sélom Klassou et des caciques du régime par exemple, sont actionnaires de Wacem SA, la société à grande exploitation du clinker togolais. Laquelle société a organisé une vaste fuite de capitaux dans le paradis fiscal de Panama. Au moment même où le chef de l’Etat Faure Gnassingbé fustige lui-même la mainmise du pays par “une minorité” et les travailleurs, taillables et corvéables à merci, sous-payés, viennent de boucler plusieurs mois de grèves sans pour autant avoir
Une collusion entre intérêts publics et privés, de hauts fonctionnaires actionnaires des sociétés administrées par eux-mêmes, tout cela sous le regard approbateur et complice du Ministre des Finances et de l’Economie.
L’opinion scandalisée et une partie de l’opposition demandent la démission du Premier ministre, le pauvre Sélom Klassou, petit porteur d’une poertefeuille de 50 actions alors que son ministre de l’Energie et des Mines, Ably Bidamon, dispose de 500 !
Est-ce pour désamorcer une crise prochaine que Faure Gnassingbé a livré M. Adji O. Ayassor à la meute, le sachant très détestable et détesté à la fois par ses collègues et l’opinion ? Ou tout simplement, le ministre Ayassor dont un leader d’opinion dit qu’il n’a de fonction que celle d’amasser l’argent à son profit, au point de le surnommer “Amassor”, est-il lui-même derrière l’un des sociétés écran qui ont participé au détournement des capitaux de Wacem?
Le bilan d’Ayassor
Quant au bilan de Monsieur Adji Otèth Ayassor, il reste pour le moins négatif. Sous son ministère, pour ne pas dire sous les recommandations du FMI et de la Banque mondiale, il y a eu la réforme des régies financières (douanes et impôts), désormais fusionnées au sein de l’Office togolais des recettes (OTR). Sans idéologie aucune, sans plan de développement, il a juste sur le plan macroéconoique essayer de se conformer sans grande conviction aux diktats des institutions de Bretton Woods.
Cependant c’est surtout sous son ministère que le Togo a entrepris une coûteuse politique d’investissement dans les infrastructures avec pour conséquence un lourd endettement du pays, chiffré à plus de 1000 milliards CFA, soit, en l’espace de 9 ans, le même montant de la dette publique qu’à la mort du Général Eyadema. Certaines infrastructures sont des éléphants blancs, comme par exemple la construction de l’aéroport de Niamtougou, alors que celle de l’aérport de Lomé estimé 142 millions d’Euros est considérée comme surestimée. D’où des soupçons de corruption, de détournment de fonds publics liés très souvent à l’attribution des marchés publics dans le domaine des BTP à des sociétés détenues par des proches du pouvoir.
On l’aura compris, l’homme au visage sec et austère n’avait l’austérité que pour les secteur sociaux, où il prenait d’ailleurs l’argent pour arroser les proches du régime.
Adji Otèth Ayassor a été pendant dix ans Secrétaire général de l’Enseignement primaire et secondaire, un ministère dont il avait une certaine maîtrise, même si l’éducation nationale ne connut pas des avancées pendant ces périodes-là. Ni après d’ailleurs. Ce fut donc une surprise de le retrouver à la tête d’un grand ministère alors que le pays vit depuis le début des années 1990, une crise sociopolitique sur fond de grandes pauvretés des masses rurales et urbaines. On retiendra de lui une grande tenacité. Ringardisé par le Professeur Kako Nubukpo, ministre de la Prospective, qui démontra à ses pairs du Gouvernement, leur incompétence et manque de vision du développement, Adji Otèth Ayassor, pénaud, n’a jamais rompu, se contentant de serrer les cordons de la bourse pour ses ministres un peu trop dépensiers à son goût. Il obtint la tête du Professeur visionnaire. Pour le plus grand malheur de l’économie du pays.
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