La campagne électorale pour le scrutin du 25 avril débute ce matin, une élection sur laquelle pèsent de forts soupçons de fraude. A la veille déjà de la campagne, le président sortant Faure Gnassingbé vient de prendre coup sur coup deux décrets en violation du code électoral. Les deux autres décrets fixent la date du vote par anticipation pour les membres des Forces armées et de sécurité et pour ceux assurant une mission au sein de la FOSEP (Force sécurité élection présidentielle). Selon ces deux décrets, les militaires voteront 72 heures avant le 25 avril. Et ils précisent qu’ils seront mis sous scellé le temps et on procédera à leur dépouillement après la fermeture des heures des bureaux le 25 avril.
Mais le président sortant, pourtant garant des lois de la République s’est senti obligé de les violer dès l’entrée son entrée en campagne :
L’article 88 du code électoral dispose :
Les membres des bureaux de vote, les délégués des candidats régulièrement inscrits sur la liste électorale nationale sont autorisés à voter dans les bureaux où ils siègent sur simple présentation de leur carte d’électeur. (…) Il en va de même pour les membres des forces armées et de sécurité en mission de sécurisation des opérations électorales et référendaires.
L’alinéa premier de l’article 99 quant à lui dispose en gras : «après la clôture du scrutin, il est procédé immédiatement au dépouillement.»
D’où vient alors les dispositions du code que les militaires doivent avant et les urnes être sous scellés pendant 72 heures ?
Ce n’est pas la première fois que le pouvoir use de ce tour de passe passe juridique pour faire voter dans des conditions douteuses les forces de l’ordre. Plusieurs mois avant la présidentielle, certains candidats ont écrit au chef de l’Etat pour exiger le vote des forces armées en même temps que tous les électeurs. Depuis la présidentielle de juin 1998, le régime RPT s’est employé à faire voter les forces de l’ordre 3 jours francs avant l’ouverture la date du scrutin. Une situation dénoncée vivement par le président mais que le parti au pouvoir s’obstine à continuer allègrement, au mépris des dispositions législatives.
Silence coupable de l’opposition et de l’opinion en général
Sur son profil Facebook, Parfait Manu Djafalo, le jeune juriste membre du cabinet Alberto Olympio, du Parti des Togolais, dénonce avec une rare virulence cette violation permanente des textes. Dans un post intitulé « QU’A FAIT LE TOGO POUR MÉRITER CETTE VIOLENTE INJUSTICE GÉNÉRALISÉE ? », M. Parfait Manu Djafalo accuse le silence coupable à la fois des candidats participationnistes à ce scrutin, mais aussi le système judiciaire, les responsables de l’armée, et surtout la société civile.
Pourquoi celui qui est sensé être le garant du respect des lois de la République se sent-il obligé de violer et de piétiner toutes lesdites lois?
Pourquoi personne ne lui dit rien?
Qu’a-t-il promis ou donné aux acteurs qui se réclament de l’opposition politique pour qu’ils acceptent de garder ce silence complice?
Pourquoi les intellectuels togolais n’osent-ils rien dire?
Pourquoi les membres de l’armée togolaise sensée être républicaine restent-ils de marbre face à ces diverses violations des lois de la République qu’ils ont pourtant juré de protéger?
Pourquoi tout le peuple togolais reste-t-il si indifférent face à toutes ces violations des lois qu’il s’est données?
Qu’a fait le Togo pour mériter cette violente injustice généralisée?
Qu’a fait le Togo à ses enfants?
Qu’a-t-il fait?
Reste que tout n’est pas perdu, dans un sursaut d’honneur et de dignité, les candidats peuvent toujours formuler un recours devant la Cour Constitutionnelle pour annulation du décret président. La Cour constitutionnelle est fondée à statuer sur les contentieux pré, per et postélectoraux.
Le processus électoral se déroule sous hautes tensions, le pouvoir ayant refusé les réformes constitutionnelle et institutionnelle promises depuis l’Accord politique global de 2006, et l’audit du fichier électoral réputé « non fiable mais consensuel » par le chef de la mission d’experts de l’OIF à Lomé. Des jacqueries couvent dans les principales villes du pays, surtout dans la Région de la Savane.
Des violences post-électorales sont redoutées d’autant plus qu’il y a une frange non négligeable de l’opposition qui appelle à un boycott actif de la présidentielle.
Le Togo a la phobie des élections. Les scrutins présidentiels débouchent très souvent dans la violence. Le pic a été atteint en 2005 avec des violences avant, pendant, après la présidentielle d’avril qui ont occasionné plu de 400 à 1000 morts selon les différentes organisations des droits de l’homme.
8000 policiers et gendarmes ont été déployés pour la surveillance de campagne présidentielle et du scrutin.
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