Une mission d’experts de la Francophonie pour le fichier électoral

Faure Gnassingbé, chef de 'Etat du Togo, et Mme Michaelle Jean, Secrétaire générale de l'OIF.
Faure Gnassingbé, chef de 'Etat du Togo, et Mme Michaelle Jean, Secrétaire générale de l'OIF.
Faure Gnassingbé, chef de ‘Etat du Togo, et Mme Michaelle Jean, Secrétaire générale de l’OIF.

Rebondissement dans le conflit  qui secoue la classe politique depuis plusieurs semaines à propos du fichier électoral. A 29 jours de la présidentielle, des sources proches du ministère de la Décentralisation et des Collectivités locales, une délégation  de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF)  séjourne depuis hier  à Lomé dans le cadre d’une mission d’assistance technique pour la consolidation du fichier électoral, à la demande du Gouvernement togolais. Seul hic, la mission ne pourra valablement faire son travail que dans un délai de quatre mois, s’il s’agit d’un réel audit du fichier électoral.

Cette mission intervient «pour rassurer tous les acteurs de la crédibilité des opérations de révision et de la fiabilité du fichier », selon le Ministère de l’Administration territoriale. La mission devra expurger le fichier de toutes les anomalies éventuelles.

Force est de noter que la mission des experts de l’OIF intervient en pleine polémique sur le fichier électoral dont l’intégrité est mise en cause par les principaux acteurs politiques.

Le Parti des Togolais et son candidat Alberto Olympio, réclament un audit du  fichier électoral selon l’article 60 du code électoral en vigueur régissant le fonctionnement de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), l’organisme chargé de l’organisation et de la supervision des élections. Un front de regroupement des partis politiques dit Front Tchoboé et la Synergie des organisations des droits de l’homme, ont mené plusieurs manifestations devant la CENI pour réclamer l’audit du fichier électoral.

Le Combat pour une alternance à l’élection présidentielle 2015 (CAP 2015) a d’ailleurs demandé une mission d’expertise de l’OIF pour l’audit du fichier électoral. Au cours d’une conférence publique, CAP 2015 a déclaré avoir décelé 29.000 doublons  issus du fichier provenant de 50 centres de recensement et de vote (CRV).

C’est finalement le ministère de l’Administration territoriale qui demande la mission d’expertise sur un fichier électoral pas encore consolidé mais contenant sensiblement près de  3.529.780, selon la CENI.

Cependant, l’arrivée de cette mission est loin de mettre la fin à la polémique qui prévaut dans le pays.

Au cours d’un débat sur la chaîne de télé privée RTDS, Alberto Olympio, le  président  du Parti des Togolais, à l’origine de la polémique sur le fichier électoral, a affirmé que l’on ne peut entreprendre l’audit du fichier électoral en quelques jours voire semaines, et que cela nécessite plusieurs mois. Bien qu’ayant accepté favorablement la présence de la mission de l’OIF, il suggère aux experts de l’OIF de ne pas succomber à la manipulation du pouvoir UNIR de faire croire à un audit en trompe-l’œil.

Dans un courrier adressé à la CENI, le Parti des Togolais et certains partis politiques aujourd’hui en course à la présidentielle (ADDI, MCD, NET, MRC)  ont demandé l’accès au fichier électoral de 2010, 2013 et 2015 en vue de pouvoir établir des éléments comparatifs sur l’évolution du fichier.

Mission d’enfumage électoral ou mission d’expertise

Voici un extrait du courrier adressé à la CENI par ces politiques en janvier et février 2015.

(…) nous voudrions préciser ici la nature de notre sollicitation, conformément au code électoral à l’article 60 de la section 4 relative au contrôle des inscriptions sur les listes électorales :
  • Avoir un accès à la base de données relationnelle contenant les informations relatives aux électeurs enregistrés pour l’élection présidentielle de 2015.
  • Avoir un accès à la base de données relationnelle contenant les informations relatives aux électeurs enregistrés pour l’élection législative de 2013.
  • Avoir un accès à la base de données relationnelle contenant les informations relatives aux électeurs enregistrés pour l’élection présidentielle de 2010.

 Autre point de polémique,  certains acteurs mettent en cause les critères de sélection des données biométriques se trouvant sur la carte électorale, les jugeant insuffisantes pour éviter toute pratique de fraude aux élections.

cartes d'électeurs

Outre les données d’identité (Nom, prénom, date de naissance, lieu de naissance, filiation) la carte d’électeur comprend aussi les données biométriques que sont :

  • La photo d’identité (format passeport);
  • Les empreintes digitales des deux index de la main.

Or, selon le Parti des Togolais, les deux index des mains ne suffisent pas pour écarter la fraude. Il a été prouvé qu’un seul individu peut disposer de 25 cartes d’électeur. Le président de la CENI, Taffa Tabiou, a déclaré lui-même s’être inscrit deux fois sur un même kit de recensement, ôtant ainsi toute crédibilité au recensement électoral.

 Pour la Synergie des ODDH, le Front Tchoboé et le Parti des Togolais,  pour des élections propres et sans violence, il est impératif de faire l’audit du fichier électoral. Ils demandent en conséquence le report du scrutin présidentiel du 15 jours.

L’audit du fichier électoral peut prendre trois à quatre voire cinq mois, selon certaines sources. Ce qui peut faire croire que la mission d’expertise de l’OIF peut sembler être une mission d’enfumage pour opposants participationnistes à la présidentielle du 15 avril.


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A propos Komi Dovlovi 1103 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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