Les Egyptiens sont tombés de Charybde à Scylla pour avoir connu plusieurs illusions démocratiques, en l’espace de trois ans. Ils ont chassé le général Hosni Moubarak, pour le remplacer par des islamistes, obnubilés par l’islamisation de la société et incapables de faire face aux défis socio-économiques. Maintenant, ils s’apprêtent à élire président le général Abdel-Fattah Al-Sissi, qui attend extirper de la société égyptienne le péril islamique. Cet Ubu, l’instigateur de toutes les violences de ces derniers mois, pour avoir conduit l’éviction de l’islamiste Mohammed Morsi , vient de faire condamner à mort près de 700 islamistes par des tribunaux aux ordres. La campagne se déroule dans un climat d’extrême violence avec des dizaines de morts.
La campagne présidentielle vient d’être ouverte ce 03 mai, le scrutin est prévu pour les 26 et 27 mai. Peu de candidats se bousculent au portillon tant le suspense est totalement absent. Il oppose le général Abdel-Fattah Al-Sissi à Hamdeen Sabbahi, une vieille figure de la gauche laïque égyptienne. Même si ce dernier est arrivé troisième à la présidentielle de 2012 qui a consacré le départ du président Moubarak, chassé par une révolte populaire, la probabilité est quasi nulle de l’emporter devant l’artisan de la restauration militaire, adulée des médias, et probablement soutenu en sous-main par les Occidentaux.
L’élection qui se déroule en Egypte n’est qu’un simulacre de démocratie. Les candidats pouvant faire de l’ombre au général sont écartés avec bienveillance ou mis sous les verrous, s’ils ne sont carrément pas condamnés à mort !
Et la campagne se déroule dans un climat de violence caractérisé par de nombreux attentats à la bombe et des assassinats des autorités publiques et des forces de l’ordre. Un tel climat de peur et de chaos ne peut être que profitable au candidat de l’armée, Abdel-Fattah Al-Sissi, le boucher des Frères musulmans.
L’espoir démocratique suscité par la révolte populaire qui a chassé Hosni Moubarak, en l’espace de quelques jours, s’est vite éteint. Les islamistes, majoritaires au sein de l’opinion, ont déçu très tôt les attentes des populations en se montrant incapables de résoudre les difficultés d’ordre socio-économiques qui ont d’ailleurs conduit le pays à la révolte contre le pouvoir militaro-civil de Hosni Moubarak.
Obsédés d’appliquer leur programme islamiste, ils se sont mis à dos les franges laïques, la minorité chrétienne et certaines puissances occidentales, jurant ainsi rapidement leur perte.
Aujourd’hui l’Egypte est revenue à la triste période de Moubarak. L’illusion démocratique n’aura été qu’une douloureuse parenthèse de sang. Au lendemain du 28 mai, le pays tout entier se réveillera avec un despote égocentrique à sa tête. L’autoritarisme est de retour en Egypte, et plus que jamais, l’armée qui détient une forte partie de l’économie, est maîtresse du jeu. La démocratie est reléguée aux calendes grecques.
Le retour à la démocratie dépendrait de l’issue de la répression des frères musulmans et de la réussite économique du nouveau pouvoir. Primo, depuis Nasser, l’histoire a montré qu’il est impossible de venir à bout des islamistes. Et dans le cas d’espèce, l’ampleur de la répression ne fait que pousser à l’extrême-radicalisation des Frères musulmans. L’Egypte pourrait être victime du syndrome algérien. Il n’est pas exclu que les violences débouchent sur une guerre civile.
Secundo, le climat des affaires n’est pas sain. La mainmise de l’armée sur une forte partie de l’économie, créant des situations de monopole, n’est pas de nature à favoriser le développement économique. L’Egypte est une économie sous perfusion. Le mal développement induit des problèmes sociaux, terreau favorable sur lequel croit la popularité des Frères musulmans.
La stabilité du pays dépendra de la réussite économique. Un défi que les militaires ne sont pas prêts de relever.
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