Ghana: la filière riz s’inquiète du recours croissant aux importations

Le riz est la 2e céréale la plus cultivée et consommée au Ghana, après le maïs. Alors que le pays cible l’autosuffisance dans cette filière, la croissance des importations est considérée comme un frein à l’essor et à la compétitivité de la production locale. 

Au Ghana, les acteurs de la filière riz alertent sur la montée en puissance des importations qui fragilise les producteurs locaux et compromet les efforts nationaux pour atteindre l’autosuffisance. D’après l’Association des producteurs de riz, des transformateurs et des producteurs de maïs, un stock total de plus de 200 000 tonnes de paddy et usiné de la campagne précédente reste actuellement invendu dans les principales zones de culture du pays.

« Les agriculteurs ne peuvent pas vendre ce qu’ils ont récolté l’année dernière, et maintenant nous récoltons à nouveau sans accès au marché. Cela devient un très gros problème », a déclaré Charles Nyaba, porte-parole de l’association, qui se confiait à la radio City FM le 29 octobre dernier. Selon lui, cette situation est attribuée à l’entrée incontrôlée de riz importé et de contrebande sur le marché local.

Alors que le Ghana produit environ 50 % de ses besoins en riz usiné, estimés à 1,8 million de tonnes par an, le recours au riz importé n’a cessé de croître ces dernières années. Les données compilées par le département américain de l’Agriculture (USDA) montrent par exemple que les achats ghanéens d’usiné sur le marché international ont grimpé de 77,41 %, passant de 620 000 tonnes au cours de la campagne de commercialisation 2021/2022 à 1,1 million tonnes en 2024/2025. Pour la campagne 2025/2026, l’organisme américain s’attend à ce que le volume importé baisse légèrement à 925 000 t.

Autre conséquence, les prix de la céréale locale ont chuté face à l’afflux de celle importée, souvent moins chère et mieux commercialisée, notamment grâce à une perception de meilleure qualité et de meilleure présentation. D’après les observateurs, cette situation freine la croissance de la chaîne de valeur du riz domestique et accroît la vulnérabilité du pays face aux fluctuations des prix mondiaux.

« Les prix ont chuté d’environ 50 % sur le marché, mais les revenus des producteurs n’ont pas augmenté pour autant. Autrement dit, ils restent non compétitifs. C’est pourquoi les transformateurs n’achètent plus de riz et les producteurs sont inquiets », a déclaré Yaw Adu Poku, président de la Competitive African Rice Platform-Ghana (CARP-Ghana), lors de l’Assemblée générale de l’organisation tenue à Tamale le 29 octobre, selon des propos rapportés par GhanaWeb. Il faut noter que le CARP-Ghana agit en synergie avec l’Observatoire du riz de la CEDEAO, chargé de coordonner les efforts pour structurer la filière rizicole en Afrique de l’Ouest.

Une réponse du gouvernement

Face à cette situation, le gouvernement ghanéen a mandaté la Société nationale de stockage tampon des denrées alimentaires (NAFCO) en septembre dernier pour acheter les surplus de céréales des stocks invendus de 2024 et ceux issus de la récolte exceptionnelle attendue en 2025. L’initiative vise à réduire les pertes post-récolte, stabiliser les marchés et renforcer la sécurité alimentaire nationale.

Un mois après, dans une intervention rapportée par GhanaWeb le 24 octobre, George Abradu-Otoo, DG de la NAFCO, a annoncé que des fonds publics ont été mobilisés et sont déjà disponibles pour rémunérer les producteurs dès livraison. Selon lui, un comité de fixation des prix incluant le ministère de l’Agriculture et les organisations paysannes, garantit une rémunération équitable. La collecte effective se fait néanmoins encore attendre dans les zones de production.

Alors qu’Accra nourrit, à l’instar de ses partenaires de la CEDEAO, des ambitions d’autosuffisance en riz, la CARP recommande la mise en œuvre de politiques publiques commerciales et de marché fortes, qui privilégient le riz local et soutiennent les producteurs tout le long de la chaîne de valeur, allant de la production à la commercialisation. « Si nous parvenons à mettre en place des barrières tarifaires pour réduire les importations et la contrebande de riz, tout en soutenant la production locale et en garantissant un marché pour le riz ghanéen, cela renforcera notre autosuffisance à l’avenir », a déclaré Mohammed Habib Abdulai, coordinateur national de la CARP-Ghana.

Stéphanas Assocle, Agence Ecofin


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A propos Colombo KPAKPABIA 1390 Articles
Colombo Kpakpabia est Directeur de publication du journal Le Temps. Il capitalise plus de 32 ans d'expérience dans la presse écrite et audiovisuelle. Colombo axe son travail sur la recherche et l'efficacité. Contact Email: [email protected]

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