Samedi soir, après une journée de manifestations et de confusion, les autorités avaient affirmé que le chef de l’État était toujours « dans le pays » et que le gouvernement se maintenait « fermement ».
Après une journée de vive confusion à Madagascar, qui a vu une partie de l’armée prendre fait et cause pour les manifestants qui réclament le départ du président Andry Rajoelina, ce dernier a déclaré ce dimanche matin qu’une « tentative de prise du pouvoir illégale et par la force » était en cours.
« La présidence de la République souhaite informer la nation et la communauté internationale qu’une tentative de prise du pouvoir illégale et par la force, contraire à la Constitution et aux principes démocratiques, est en cours sur le territoire national », a déclaré Andry Rajoelina dans un communiqué.
La manifestation de ce samedi à Antananarivo a été l’une des plus importantes depuis le début de la contestation le 25 septembre. Lancée par le collectif Gen Z pour protester contre les coupures d’eau et d’électricité, la fronde s’est muée en une remise en cause des responsables politiques, à commencer par le président Raojelina, et a fait tanguer le pouvoir malgache, ce samedi.
Andry Rajoelina « dans le pays »
Samedi en fin de journée, la présidence a publié un communiqué assurant que Andry Rajoelina « reste dans le pays » et « continue de gérer les affaires nationales », alors que des informations contradictoires avaient circulé sur le sujet dans la journée.
Le nouveau Premier ministre, Ruphin Zafisambo, a pour sa part assuré que le gouvernement, « qui se maintient fermement », était « prêt à collaborer et à écouter toutes les forces : les jeunes, les syndicats et l’armée ». « Madagascar ne pourra pas résister à d’autres crises si cette division entre les citoyens persiste », a poursuivi le général Zafisambo dans un bref discours filmé.
La police a fait usage samedi de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes pour disperser plusieurs milliers de manifestants dans la capitale. Une partie des policiers sont partis lorsque des soldats ont pénétré dans la ville dans des véhicules militaires, certains agitant des drapeaux malgaches, et ont rejoint la foule en liesse. Le départ de la police a permis à la foule de rejoindre la très symbolique place du 13-Mai, devant l’hôtel de ville d’Antananarivo.
« Ils doivent quitter le pouvoir »
Sur place, le colonel Michael Randrianirina, du Corps d’armée des personnels et des services administratifs et techniques (CAPSAT), unité militaire ayant appelé à la désobéissance, a déclaré que la police avait tiré sur ses soldats, touchant un militaire et un journaliste. « À tous ceux qui ont envoyé les gendarmes ici, à commencer par le chef de la gendarmerie, le Premier ministre, le président […] Ils doivent quitter le pouvoir », a-t-il ajouté. Selon des médias locaux, les services de secours ont fait état de deux morts et de 26 blessés samedi. Des coups de feu ont été entendus pendant la manifestation. Des tirs et des explosions ont encore retenti dans le centre de la capitale à la nuit tombée.
Avant de quitter leur base militaire du district de Soanierana, en périphérie d’Antananarivo, les soldats du CAPSAT avaient appelé à la désobéissance. « Unissons nos forces, militaires, gendarmes et policiers, et refusons d’être payés pour tirer sur nos amis, nos frères et nos sœurs », ont-ils déclaré dans une vidéo. En 2009, cette base avait déjà mené une mutinerie lors du soulèvement populaire qui avait porté au pouvoir l’actuel président.
Les revendications de la Gen Z
« N’obéissez plus aux ordres venant de vos supérieurs. Braquez vos armes sur ceux qui vous ordonnent de tirer sur vos frères d’armes car ce ne sont pas eux qui vont s’occuper de notre famille si jamais on meurt », ont encore lancé les militaires. Le nombre de soldats ayant répondu à cet appel n’est pas connu.
Le mouvement Gen Z a appelé Andry Rajoelina à démissionner et présenté une liste de revendications écrites comprenant « le lancement d’un dialogue national démocratique » et « l’accès universel aux services essentiels », de l’eau à l’emploi. « Nous réaffirmons fermement que nous ne cherchons pas à organiser un coup d’État ni à prendre le pouvoir par la force », a déclaré le mouvement dans un communiqué, tout en remerciant le CAPSAT pour son « geste puissant et historique ».
Au moins 22 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations et plus d’une centaine blessées, d’après un bilan des Nations unies. Le président Rajoelina a démenti des « chiffres erronés » mercredi, estimant les « pertes de vies » à 12, tous « des pilleurs, des casseurs » selon lui. Après avoir adopté au début un ton conciliant, puis renvoyé son gouvernement en réponse aux manifestations, le président a nettement durci le ton, nommant un militaire comme Premier ministre le 6 octobre ainsi que seulement trois nouveaux ministres jusqu’ici, tous issus des forces de sécurité : ceux des Armées, de la Sécurité publique et de la Gendarmerie.
Jeune Afrique
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