Mali: Le général Abdoulaye Maïga est nommé Premier ministre

La télévision d’Etat, l’ORTM vient d’annoncer la nomination du général Abdoulaye Maïga comme premier ministre de Transition du Mali. Il succède Choguel Kokalla Maïga, démis de ses fonctions hier à la suite de vives critiques  contre la conduite de la Transition par la junte. En étant désormais aux avant-postes, reste à savoir si l’armée va se retrouver désormais de plain-pied dans les affaires politiques avec les partis.

Le général de division Abdoulaye Maïga n’est pas nouveau dans le sérail. précédemment ministre de l’Administration territoriale et porte-parole du gouvernement, il a une réputation de grand liseur lyrique des discours contre la France, les Occidentaux et tout récemment l’Algérie.

Il ne fait pas partie des cinq militaires qui avaient mené le coup d’État d’août 2020, mais il a rapidement su gagner leur confiance, prendre de l’envergure et s’imposer en pilier du régime de transition. Ministre d’État, Abdoulaye Maïga est d’ailleurs passé du grade de colonel à celui de général en même temps qu’Assimi Goïta et que les autres militaires putschistes, au mois d’octobre.

Néanmoins le nouveau premier ministre semble tout de même l’homme le plus adapté parmi les généraux à conduire un gouvernement dirigé par un militaire. Sa présence à  l’Administration territoriale lui a permis de faire des rencontres avec la classe politique et de nouer des relations avec les dirigeants des partis et les organisations de la société civile. Sa gouaille et son entregent peuvent constituer un atout indéniable.

Cependant le nouveau ministre devra néanmoins surmonter d’énormes défis. Le fait d’être militaire  et de diriger un gouvernement ne va pas être une tâche facile. Pour la première, l’armée se retrouve directement dans l’arène politique, directement dans la mêlée alors que ces trois dernières années elle s’effaçait derrière les civils pour ces tâches ingrates. L’armée n’est plus au-dessus de la mêlée alors que plus de onze dirigeants de partis ainsi que des leaders d’opinion sont en prison pour des raisons de participation à des réunions politiques.

Choguel Maïga, une épine dans le pied de la junte

L’autre défi à surmonter reste le cas Choguel Maïga, qui semble avoir préparé sa démission et se refuse à rester en dehors du théâtre politique d’autant plus qu’il nourrit également des ambitions présidentielles. Il se susurre dans la capitale que la junte va se défaire de l’ancien Premier ministre Choguel Maïga, soit par une accusation  de « déstabilisation »  et ou de « trahison ». Ce qui pourrait conduire à un emprisonnement voire une mise en résidence surveillée. Populaire dans le pays, le cas Choguel Maïga est une épine dans le pied dans la junte de Bamako. Nul ne sait comment réagira la population en cas d’emprisonnement de l’ancien Premier ministre.

La gestion du quotidien reste le défi supplémentaire à surmonter pour les militaires. Le Mali subit les contrecoups de sa rupture brutale avec la France et ne bénéficie  plus de certaines facilités financières. L’Agence Française de Développement y a fermé ses portes, à la demande d’ailleurs de la junte. Le pays traverse des marasmes économiques et connaît une crise énergétique record. Les Maliens ont à peine 10 heures d’électricité par jour et la plupart des quartiers se retrouvent dans l’obscurité la nuit alors que le pays vit une crise d’insécurité que la junte n’arrive plus à juguler. La capitale n’est hors d’atteinte des groupes djihadistes qui ont tout récemment attaqué deux bases militaires avec de nombreux dégâts dans le camp de l’armée. Les villes les plus proches de la capitales accueillent des milliers de réfugiés. Malgré la prise de Kidal, la capitale rebelle des Touarègues, le pays connaît toujours les mêmes problèmes que depuis 2020. Tout se passe comme si rien n’a changé depuis la prise du pouvoir par les militaires, malgré la propagande que les populations insupportent de plus en plus.

La junte fait un saut dans l’inconnu avec la nouvelle situation. Insécurité, crise économique, crise énergétique, la junte est au bord de la crise des nerfs et se crée toute seule une crise politique.


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A propos Komi Dovlovi 1148 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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