Le PNP (Parti national panafricain) annonce la reprise des manifestations populaires synchronisées le 13 avril prochain, selon un communiqué du parti à l’origine du regain de la crise togolaise.
Les manifestations auront lieu simultanément dans plusieurs villes du Togo et dans les communautés diasporiques d’Europe , des Etats-Unis et du Canada.
Les marches auront lieu à Lomé, Kpalimé, Kévé, Afagnan, Anié, Tchamba, Sokodé, Bafilo, Mango et Dapaong, sur le plan national, et en Italie, Belgique, Angleterre, Hollande, Suisse, aux Etats-Unis et au Canada.
Comme en août 2017, le PNP revendique “l’application intégrale de la feuille de route de la CEDEAO”, “la libération des détenus politiques” , avec les mot d’ordre « 52 ans, ça suffit », « Stop ! Atteintes aux libertés ».
En clair, le retour à la Constitution de 1992 et les autres réformes normatives des institutions.
Cette manifestation intervient après l’éclatement, cette semaine, de la Coalition des 14 partis de l’opposition (C14), après le boycott des législatives du 20 décembre 2018.
Des questions d’orientation stratégique à l’issue des législatives ont conduit à la dislocation de la C14. Le PNP est d’ailleurs le premier parti à se retirer, annonçant son intention d’arriver à l’alternance dans le pays par la reprise de “la sensibilisation” et de “la mobilisation populaire”.
« À la suite de la dislocation de le C14, notre parti le PNP a décidé de tirer les conséquences qui s’imposent en poursuivant seul son combat pour le changement dans notre pays. À cet effet, une manifestation est prévue le 13 avril 2019 sur le plan national et dans la Diaspora », indique le communiqué.
Divergences d’orientation stratégique entre les partis
Cette reprise de la mobilisation populaire intervient près de 15 mois après les premières manifestations du PNP les 19 et 20 août 2017, dont le déroulement synchrone dans plusieurs villes du Togo et de ses diasporas en Europe et en Afrique.
Lesdites manifestations ont révélé la gravité de la crise togolaise, qui est celle d’une armée et d’une famille aux affaires depuis plus de 50 ans, verrouillant toute alternance démocratique dans un pays exsangue économiquement. Elles ont montré surtout l’émergence du PNP et de son leader Tikpi Atchadam en tant que alternative possible à une opposition discréditée par son incapacité à offrir le changement et ses compromissions avec le pouvoir.
Suite à l’appel de Tikpi Atchadam à Jean-Pierre, président de l’ANC, s’est constituée une grande coalition (C14) des forces démocratiques, dont les mobilisations populaires ont fini par pousser la CEDEAO à initier une médiation.
L’échec de la médiation de la CEDEAO s’est soldé par l’organisation des législatives du 20 décembre 2018 boycottées par les partis de la C14. Un parlement scandaleusement dominé par le parti au pouvoir (59 sièges sur 91), ses alliés – 18 indépendants, et ses opposants choisis.
La nouvelle donne politique avec un Faure Gnassingbé ultraminoritaire dans l’opinion mais consolidé par des élections pseudo-démocratiques, a conduit à l’éclatement de la coalition des 14 dont les membres ont de fortes divergences quant à l’orientation de la lutte.
A l’approche des premières élections locales- les premières organisées depuis 33 ans-, et de la présidentielle 2020, de fortes divergences de stratégie sont apparues au sein de la Coalition. Les uns, à l’instar du PNP, misent sur la mobilisation de la rue pour conquérir le pouvoir tandis que pour d’autres, la participation aux deux prochaines élections reste envisageable. M
Manifestations du PNP : La saison 2 réussira-t-elle à l’emporter
Chasser la junte militaro-civile par la révolution populaire est une constante dans la stratégie de l’opposition togolaise, laquelle stratégie n’a montré que peu d’efficacité. Mais celle-ci prend une tournure fétichiste voire romantique chez le PNP dont les maîtres mots sont «sensibilisation » et «mobilisation» et « révolution »
Toute autre stratégie est rejetée: «Pas besoin d’une charte| de la C14, NDLR], car la coalition est un groupe pour une unité d’action. Les élections ne sont pas encore à l’ordre du jour», a souligné Ouro-Djikpa Tchatikpi, le conseiller politique de Tikpi Atchadam.
Or- malgré son caractère gigantesque et spectaculaire- la mobilisation à la mode PNP a montré ses limites dès les premières heures, ayant été quasiment annihilée par la forte répression policière et militaire.
Le PNP a une base essentiellement ethnique, celle des Tems, située dans leurs régions d’origine de Sokodé et de Bafilo ainsi que dans les communautés diasporiques de Kara, Anié, Agoé-Zongo, Kpalimé et Dapaong. Si le parti a pu acquérir une notoriété nationale par la suite, il y a une grande incertitude que la mobilisation retrouve son ampleur de 2017-2018, surtout avec la dislocation de la C14.
Le blocus militaire- partiellement levé- des villes de Mango, Bafilo et Sokodé en 2017-2018, dissuade toute mobilisation. Or le PNP ne prévoit pas autre chose à part le slogan « asigbalo » (une manifestation non-violente).
Il semble que les dirigeants du PNP, dont le premier responsable, craignant pour sa sécurité, s’est pourtant volontairement exilé à l’étranger, surestiment la capacité des masses à lutter contre une dictature militaire ayant la gâchette facile, et à supporter des manifestations pendant de longues durées.
L’histoire des manifestations populaires au Togo a montré qu’elles s’éffilochent avec la durée et s’estompent avec la répression militaire.
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