Qu’est-ce qui donc fait courir l’héritier-successeur du Général Eyadema? Depuis quelques jours, dès la clôture du premier congrès statutaire de son parti politique Union pour la République (UNIR), Faure Gnassingbé n’a pas de répit: visites de casernes, inauguration de réalisations sociales, pose de première pierre… Contre ses adversaires mobilisés pour avoir sa tête, le Président « simple » lance une offensive de charme qui n’a rien d’anodin.
D’après nos informations, Faure Gnassingbé met en oeuvre une stratégie bien rodée, destinée à prendre une longueur d’avance sur ses opposants dans la compétition politique. Il s’agit d’un scénario dont les phases clés visent à redorer le blason de l’homme Faure et lui offrir les gages de conserver le pouvoir en 2020, ou avant! Le plan a été dicté par les récents événements au pays, mais trouve sa source dans les conclusions de la Commission de réflexion pour les réformes constitutionnelles et institutionnelles. Nos sources indiquent que le Président aurait lu ledit rapport à plusieurs reprises et aurait mis en place un Comité technique formés de ses conseillers, pour l’aider à établir un plan d’action en vue de faire face aux défis qui y sont dégagés.
D’après ce rapport, les populations togolaises consultées par la Commission n’en voudraient pas à la personne de Faure Gnassingbé. La majorité des citoyens rencontrés dans les préfectures auraient plutôt remis en cause les politiques mises en oeuvre dans les différentes localités qui ne bénéficient pas aux personnes ciblées. Ils auraient indexés des personnes au gouvernement et dans l’administration qui sont à la source de la mauvaise gestion. En clair, ce sont les collaborateurs du Président qui sont la cause mauvaise image véhiculée par le régime et que l’opposition attribue au président. Ainsi pour y faire face, le chef de l’Etat doit mettre la main à la pâte…
Ainsi avant les prochaines consultations électorales, Faure Gnassingbé veut se donner l’image d’un bâtisseur, qui a les solutions aux vrais problèmes de la population. D’où les inaugurations de centrales solaire, de systèmes d’adduction d’eau et autres poses de première pierre pour la construction de marchés…On parle aussi d’un prochain remaniement ministériel et de plusieurs mutation au sein des institutions publiques. Dont acte!
La trappe électorale
Pendant que les opposants marchent pour réclamer son départ, l’homme (de Pya et d’Agou) a balisé son projet politique. En ligne de mire, les prochaines élections législatives en 2019 qui pourraient être précédées ou couplées avec les élections locales. Au Congrès d’UNIR, la décision a été prise et les dispositions notifiées pour que le parti UNIR contrôle toutes les grandes municipalités ainsi que les communes rurales.
Des « experts » contractés par la présidence travaillent aux scénarios dans ce sens. Mais le plus gros coup en préparation concerne l’élection présidentielle. Pour éviter l’érosion de la crédibilité du président (au plus bas dans l’opinion depuis trois mois), on étudie la possibilité d’anticiper la tenue de l’élection présidentielle, quelque temps après le référendum, probablement avant Juin 2018. Ainsi au regard de la tournure que prendra le dialogue politique, le gouvernement convoquerait plus tôt le corps électoral.
Quitte ou double
Les sorties de Faure Gnassingbé s’inscrivent donc dans un schéma de campagne électorale (précoce) dont le but n’est autre que de s’imposer comme l’homme Faure qui jouit d’une réelle adhésion au sein de la population. On annonce aussi un message à la Nation dans quelques jours (avant celui de fin d’année) au cours duquel celui qui boucle 12 ans à la tête du Togo va confirmer qu’il tient à poursuivre sa mission à la tête du Togo.
L’autre action qui rentre dans la stratégie de préservation et de conservation du pouvoir est le verrouille sécuritaire du Centre et du Nord du pays. Alors que les villes telles que Sokodé, Mango, Kara et Bafilo s’étaient mobilisées (grâce à l’action du PNP notamment) pour contester le régime, il n’est plus question de laisser faire. L’armée use d’une stratégie de terreur pour imposer son ordre dans ces localités, pour permettre au régime de continuer à en faire son vivier électoral naturel.
Pour le moment, l’opposition (coalition des 14 partis) n’est pas dans une logique de compétition électorale. Elle jette tout son dévolu sur la mobilisation populaire et aussi sur des discussions politiques. Or, si le dialogue échoue, le pouvoir sera sur un boulevard pour organiser son référendum et les autres scrutins, en comptant sur l’opposition pour les boycotter.
Au regard du niveau de mobilisation et de détermination de la population qui réclame le changement, ce plan du régime pourrait être voué à l’échec. L’opposition pourrait se renforcer et précipiter par des voies diverses le régime qui a eu 50 ans, cette année.
Joséphine Bawa
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