L’ancien Premier ministre Edem Kodjo a été fait Chevalier des Palmes académiques de France ce 2 juillet 2014. La distinction lui a été remise par l’Ambassadeur de France, Nicolas Warnery au cours d’une cérémonie à l’Ambassade de France. Une distinction qui intervient alors que l’ancien Premier ministre pourrait être à 76 ans, le prochain Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie.
L’ordre des Palmes académiques est une décoration qui honore les universitaires les plus distingués. D’après Edem Kodjo, il a été proposé par son “ami”, Edmond Jouve, Professeur émérite de l’Université Paris Descartes, Sorbonne, Paris Cité, Président de l’Académie Centrale Européenne des Sciences, des Arts et des Lettres, “qui a estimé que [Kodjo] méritai[t] les Palmes académiques, créées il y a plus de 200 ans (206 exactement) par Napoléon 1er” (sic).
L’ancien Premier ministre est certainement honoré pour son parcours universitaire, lors de son exil français, suite à des déconvenues avec le régime d’Eyadema, lors de la crise d’admission de la République arabe Sahraouie à l’OUA. Edem Kodjo a été enseignant de 1983 à 1991, Professeur associé à l’Université de Paris I (Panthéon – Sorbonne) dans le département des Sciences politiques, et Professeur de Relations internationales en DEA d’études africaines.
Mais derrière cette distinction, il y a aussi un parcours fleuve sur la scène politique et intellectuelle, l’homme politique togolais ayant eu la plus longue longévité sur le théâtre politique. Tour à tour gouverneur du FMI, ministre de l’économie et des finances, ministre des affaires étrangères, secrétaire général de l’OUA, premier ministre à deux reprises, ministre d’Etat auprès du Président, ministre conseiller politique de Faure Gnassingbé. Il y a très peu qui peuvent se targuer d’un background aussi riche en enviable.
Sur le plan intellectuel, Kodjo est un bel esprit, pétri des humanités et surtout de culture française, peut-être un peu trop, au point que l’on croit qu’il croît avoir une âme française. Panafricaniste, il est auteur de Et demain l’Afrique et d’une Lettre à l’Afrique cinquantenaire. Kodjo se targue d’être un touche-à-tout : il est auteur d’un médiocre roman, Au commencement était le glaive, et de deux mauvais livres patristiques.
Le collectionneur des honneurs
La vie d’Edem Kodjo est une histoire d’honneur et de distinctions. En termes de distinctions honorifiques, seul peut-être le maréchal Josip Tito le surpasserait. L’ancien premier ministre d’Eyadema et de Faure Gnassingbé le dit sans ambages, sur un ton certes mi-badin mi sérieux dans sa réponse à l’ambassadeur M. Nicolas Warnery :
Le saviez-vous M. l’Ambassadeur ? L’homme que vous honorez et que vous venez de décorer ce jour est un dangereux récidiviste. Après avoir, dans ses jeunes années fait main basse sur la légion d’honneur française (Officier dans la trentaine puis commandeur quelques décennies plus tard), il s’en est pris avec succès mais comme par effraction à l’ordre prestigieux des Arts et des Lettres (Officier).
Puis, au crépuscule encore lumineux de sa vie, alors qu’on le croyait vraiment repenti, le voici, menant avec alacrité sa carrière d’Arsène LUPIN, assouvissant son irréfragable envie de collectionneur, le voici donc acquérant sans coup férir, la médaille chère aux enseignants de haut parage : celle des Palmes académiques. Fichtre !
C’est tout dire. S’il reçut des distinctions prestigieuses décernées par la France, il fut également distingué pour des colifichets. Comme par exemple ce “Prix du meilleur promoteur de la Poésie au Togo” en 2012, délivré par le Cénacle, une obscure association réputée pour ses connaissances très limite en poésie et pour avoir édité des ouvrages devant servir à caler des meubles. Ce qui fit dire à un de ses proches que Kodjo aime tellement les honneurs qu’il serait prêt à aller grappiller une distinction délivrée par le dernier village du Togo !
Est-ce cette ivresse des sommets qui le poussa à procéder à certains choix politiques ? Edem Kodjo est arrivée sur la scène politique en 1967, peu après le coup d’Etat du 13 janvier, alors qu’il menait une carrière prestigieuse en France. Il mit carrément le pied à l’étrier à Eyadema en créant en 1969, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), parti unique, parti-Etat. Depuis cette date, il a à peine quitté la scène politique. Sa longévité extraordinaire mérite une biographie digne de ce nom. Affaire à suivre.
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