Les meilleures blagues étant les plus courtes et toutes les bonnes choses ayant une fin, il apparaît grand temps de renoncer à cette folie hebdomadaire consistant à prohiber une pratique vestimentaire ordinaire en quelques lignes, à coup de blagues et de beaucoup trop de “au vrai”. De fait, après 101 édits, la source s’est tarie. Même si le mauvais goût vestimentaire, ne doutons pas de lui, ne cessera jamais de se renouveler…
A l’heure du bilan, il convient donc, outre de dire que ce fut génial, de remercier tout le monde et d’embrasser très fort sa maman, de tirer quelques conclusions et leçons de tout ça. Commençons par la plus importante. La faute de goût n’appartient à personne. Elle n’a ni âge, ni genre, ni classe sociale. Elle est partout. Elle se nourrit de l’excès de mode, comme de l’excès de ringardise. Elle prospère dans le conservatisme comme dans l’extravagance. Elle frappe les corps les mieux faits comme les silhouettes les plus ingrates. Elle n’a besoin de rien mais s’accommode aussi très bien de l’opulence. Elle est donc bourge et beauf à la fois. Avec autant de panache.
PREUVES PHOTOGRAPHIQUES
Au vrai (tiens, tiens), nul n’est donc à l’abri de la faute de goût, pas même les faiseurs de règles eux-mêmes. A ce stade de l’exercice en onanisme, l’auteur de ces lignes (ici dessiné par Bob London) doit ainsi passer à confesse et avouer transgresser, parfois, les interdits édictés avec tant d’aplomb. De fait, l’existence de preuves photographiques le contraint à reconnaître le port, au fil des ans, de bonnets ridicules, de cravates anorexiques, de jeans blancs, de chaussures pointues, de doudounes grotesques, de chemisettes bleu ciel et même de mocassins à glands. Sur la plage, il lui est même encore arrivé, cet été, d’enfiler péniblement son maillot de bain derrière une serviette publicitaire un peu trop petite, au point qu’il en déborde de toutes parts.
Néanmoins, ce n’est pas la fin du monde. Car passé quelques principes stylistiques fondamentaux, incontestables et relevant surtout du bon sens (habillez-vous à votre taille, habillez-vous chaud en hiver et léger en été, habillez-vous de façon plus sophistiquée pour un mariage que pour un séminaire d’entreprise, habillez-vous en fonction de votre âge…), ce n’est pas la règle ou l’interdit qu’il faut retenir. C’est le vêtement et son usage qu’il faut analyser. Car ceux-ci parlent de l’époque. Ainsi, si l’on s’habille de plus en plus moulant, c’est bien parce que le culte du corps pousse chacun, de nos jours, à vouloir être un peu plus mince qu’il ne l’est vraiment. De même, si de plus en plus de cadres transportent leur ordi portable dans un sac à dos, c’est bien parce qu’on leur demande d’être plus mobiles et flexibles que jamais…
Au vrai (tiens, tiens, tiens), il y a donc, derrière chaque usage et chaque tic vestimentaire, une histoire, une technique, une ficelle psychologique, un héritage sociologique ou une embûche marketing. Derrière chaque faute de goût, il y a même, finalement, une explication et, presque, une excuse valable. Ce n’est pas une raison suffisante pour se retenir de rire du mauvais goût vestimentaire des autres, mais ce fut une bonne raison pour s’y frotter chaque semaine pendant deux ans. En n’oubliant jamais que l’homme en pantacourt est un homme quand même.
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