Une semaine déjà que le Bénin a frôlé l’impensable : un coup d’État pour renverser le pouvoir en place. La tentative a été déjouée, l’ordre républicain rétabli. Mais au-delà du calme apparent, des traces demeurent. Chez les jeunes surtout, ceux qui n’avaient jamais connu les coups de force qui ont marqué l’histoire du pays.
À l’aube de ce dimanche 7 décembre, le bruit des armes réveille Cotonou, la capitale économique du Bénin. Pour toute une génération née dans un Bénin démocratique, la stupeur est totale.
Des jeunes traumatisés
« J’étais attristé parce que je n’ai jamais vécu une situation de coup d’Etat, tout cela s’était passé avant que je ne vienne au monde » témoigne Franck Dognito. Ce matin-là, c’est un pan d’histoire que le jeune homme découvre brutalement. Il raconte par ailleurs que « quand on entend les devanciers raconter tout ce qui s’était produit lors des coups d’Etat que le Bénin avait enregistrés auparavant, ce n’est pas du tout de la joie ».
Pour Franck « c’est une malheureuse situation et en même temps tout ce que ça a créé comme inconvénients psychologiques, ce n’est pas du tout bien ».
Pour d’autres, la peur n’était pas seulement symbolique. À Fidjrossè-Togbin, quartier qui abrite le camp de la Garde républicaine, les détonations étaient réelles, proches, angoissantes. Kévin Arnauld Mèton ne s’en est pas encore remis.
Il explique ainsi que la situation l’a vraiment traumatisé parce que sa maison est derrière le camp militaire à Togbin. « Ils envoyaient des trucs, je ne sais si ce sont des missiles ou si ce sont des bombes. Mais ce sont des trucs qui vont directement dans le camp précisément et le camp était bouleversé, on se demandait si le quartier allait être détruit. Donc c’était réellement traumatisant. Je me demandais ce que je peux devenir si réellement ce truc passait… » se souvient Kévin.
Comme lui, Murielle d’Almeida, 19 ans, étudiante, est encore sous le choc. « Ce que j’ai vécu en cette journée du dimanche 7 décembre dernier m’est resté encore dans la gorge. La peur, l’émotion, les craintes. Notre maison est juste derrière l’aéroport et on se demandait ce qu’il allait se produire. Je revois encore les images. Je ne savais même pas que cela s’est passé une fois dans l’histoire du pays. Vraiment ! On n’oubliera pas de sitôt » assure la jeune femme.
Le besoin de connaître l’histoire
Les anciens, eux, se souviennent. Ils ont connu les coups de force, les ruptures brutales, les lendemains incertains. Jean Prince Aho appelle à la mémoire et à la vigilance. Selon lui « il faut connaître l’histoire des coups d’Etat pour qu’ils prennent certaines dispositions pour que ça ne se répète pas, parce que le plus souvent ça n’arrange pas le pays, ça n’arrange pas du tout le pays… »
Une semaine après, le calme est certes revenu mais dans les esprits, surtout chez les plus jeunes, quelque chose a changé. La démocratie, longtemps perçue comme acquise, est apparue fragile. Et ce dimanche-là, pour toute une génération béninoise, l’histoire a cessé d’être un récit pour devenir une expérience.
Rodrigue Guézodjè, DW
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