L’autopalpation des seins, un geste qui sauve

Dans un monde ou le cancer du sein reste l’un des plus fréquents chez les femmes, l’autopalpation s’impose comme un outil de prévention puissant et accessible. Ce geste, souvent méconnu ou négligé, permet à chacune de mieux connaitre son corps et de détecter précocement d’éventuelles anomalies.

Si certaines actions de dépistage ne peuvent être réalisées que par un médecin, l’autopalpation est un examen simple et rapide, qui peut être pratiqué régulièrement par toutes les femmes et filles. Ce geste simple est très encouragé par les professionnels de santé.

Intérêt pour la femme ou la jeune fille d’examiner soi-même ses seins

Les glandes mammaires sont le foyer de départ de la plupart des cancers du sein. Au Togo, le cancer du sein est l’un des plus meurtriers. Sur 973 cas recensés en 2022, 524 femmes ont perdu la vie. « Le cancer dévore les seins de nos sœurs. La situation est grave car la maladie continue de faire des ravages. Plus il est dépisté tôt, plus les chances de prise en charge et de guérison sont élevées », a affirmé Dr Adjovi Rose Adjenou-Atanley, directrice du Centre international de cancérologie de Lomé (CICL). Pour prévenir les risques de cancer du sein, les professionnels de santé conseillent aux filles en âge de procréer de pratiquer l’autopalpation des seins juste après les périodes de menstruation.

L’autopalpation, peu pratiquée par les femmes

Lors d’une rencontre de l’association « FemSansCancer » (FSC), le 4 octobre à Lomé, le docteur Damien Ekoue-Kouvahey, responsable de l’ONG Volontaires internationaux pour la promotion de la santé en Afrique (VISA), a fait savoir que la majorité de filles ne sont pas habituées à pratiquer l’autopalpation ; « elles trouvent souvent que ce geste est trop anodin pour donner des résultats », a-t-il dit.

De janvier à mai 2020, l’étude « Connaissance et pratique de l’auto-examen des seins chez les femmes en âge de procréer à Kara, nord du Togo », publiée dans la revue internationale de recherche avancée (IJAR) en décembre 2023 a montré que l’auto-examen des seins est peu pratiqué chez les femmes de la ville de Kara.

D’après les résultats, 52,68 % n’étaient pas conscients de la possibilité d’un auto-examen. En ce qui concerne la pratique, 29,47 % d’entre elles ont déclaré avoir pratiqué ou pratiquent l’auto-examen des seins. Les raisons à cette faible pratique étaient le manque de connaissances (58,73 %), l’insouciance (28,57 %), l’absence de signe mammaire (12,69 %). A ceci s’ajoute la désinformation propagée par certains hommes religieux qui font comprendre à des jeunes filles que l’autopalpation des seins est un geste de masturbation, affirme Dr Ekoué-Kouvahey.

Alerter et dépister précocement un cancer du sein

« L’autopalpation des seins consiste à observer attentivement et palper les seins en position allongée ou debout à la recherche d’une quelconque modification de ces derniers. Les signes se révèlent par la rougeur du sein, la peau d’orange sur le sein, une rétraction sur la peau du sein, des liquides tels le sang, le pus et autres constatés lors de la palpation, des plaies ou nodules sur le sein, des ganglions au niveau des aisselles ou sus-claviculaires », indique Dr Kafui Benedicta Amewoui, gynécologue obstétricienne, responsable de la Clinique Group Medical à Lomé. Selon elle, l’autopalpation des seins est un geste de prévention, même si cela ne remplace pas les dépistages classiques, tels que la mammographie, recommandée à partir de 50 ans tous les deux ans, et la visite annuelle chez le gynécologue.

Mme Irénée Dotou, sage-femme, membre de la ligue togolaise contre le cancer (LTC) a, lors d’une séance de sensibilisation organisée par la branche togolaise de l’Association women In logistics Africa (WILA-Togo) en octobre 2023, insisté sur le fait que la jeune fille et la femme ménopausée doivent régulièrement s’autoexaminer pour qu’au cas où il y ait un début de cancer cela soit vite pris en charge.

Malgré la méconnaissance de la méthode par certain et la résistance des autres, il existe des femmes qui en font confiance à l’instar de Nicole, 28 ans. Selon elle, c’est un bon exercice. Cela permet à la jeune fille ou femme de mieux connaître son corps et savoir rapidement s’il y a une éventuelle modification afin d’alerter le gynécologue et trouver une solution rapide s’il y a lieu.

Comment se fait l’autopalpation ?

Selon Dr Améwoui, l’autopalpation se fait en deux étapes : la position debout et la position couchée. « Pour la position debout, il y a l’inspection et la palpation. D’abord vous enlevez votre soutien-gorge, et vous vous mettez face à un grand miroir pour bien inspecter vos seins et détecter tout changement au niveau de la morphologie des seins. Tout changement au niveau de la peau doit vous alerter (peau d’orange, seins tuméfiés ou volumineux, changement de couleur), ou tout écoulement au niveau des mamelons », a-t-elle expliqué.

Une fois cette inspection bien faite, il faut passer à l’étape d’autopalpation debout face au miroir. Pour palper le sein gauche, il faut placer la main gauche sur la nuque, puis avec la main droite, « vous ramenez le pouce vers la paume et avec les quatre doits serrés et à plat, on procède à l’autopalpation après avoir divisé le sein en 4 cadrans imaginaires. Vous palpez d’abord le creux de l’aisselle puis le sein, cadran par cadran de l’extérieur vers l’intérieur et dans le sens des aiguilles d’une montre. Faire la même opération du côté droit en plaçant la main droite à la nuque », indique la gynécologue.

Pour finir, le docteur recommande de « pressez légèrement le mamelon pour voir s’il en sort un liquide. Il ne faut pas oublier de palper la région sus claviculaire (en haut de l’os qu’on appelle la clavicule entre le cou et l’épaule). Refaites le même exercice en position couchée », a-t-elle expliqué.

Encourager l’autopalpation, c’est promouvoir une culture de la prévention et de l’autonomie. Des organisations évoluant dans le domaine de la santé, des groupes de soutien aux femmes et des professionnels de la santé au Togo, s’attellent davantage à encourager les femmes à prendre en main leur santé en pratiquant régulièrement l’auto-examen des seins.

Avec ATOP


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A propos Colombo KPAKPABIA 1390 Articles
Colombo Kpakpabia est Directeur de publication du journal Le Temps. Il capitalise plus de 32 ans d'expérience dans la presse écrite et audiovisuelle. Colombo axe son travail sur la recherche et l'efficacité. Contact Email: [email protected]

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