Du Maroc au Népal, de Madagascar à la Serbie : la révolte mondiale de la génération Z

Un mois plus tôt, c’était le Népal, un État rarement sous le feu des projecteurs, qui voyait son pouvoir être renversé par la rue. Après l’incendie du Parlement, la chute du gouvernement et une tentative de répression féroce, un gouvernement de transition a été nommé, chargé d’organiser des élections en 2026.

De l’Indonésie au Maroc, en passant par le Népal, la Serbie et Madagascar, un puissant vent de contestation souffle dans de nombreux pays en développement depuis la fin de l’été. Que se passe-t-il ? Une jeunesse en révolte. La « génération Z », actuellement âgée de 13 à 28 ans, proteste contre des régimes jugés corrompus, des inégalités de richesse criantes et des systèmes qui découragent l’effort et le mérite individuels pour maintenir les privilèges des castes dirigeantes.

Au Népal, la révolte s’est cristallisée sur la chasse aux « nepo-kids » (abréviation du terme « népotisme »), ces jeunes privilégiés qui font étalage d’un mode de vie fastueux sur les réseaux sociaux sans jamais indiquer d’où provient leur richesse.

Des clips vidéo viraux ont mis en parallèle ces clichés de luxe avec des images d’extrême pauvreté dans le pays, accompagnés de slogans comme « Nos impôts, votre luxe… Nous payons, vous frimez », ou des hashtags fédérateurs, indique France 24. Un mouvement assez puissant pour provoquer la chute de l’ancien Premier ministre KP Sharma Oli !

Au Bangladesh, un mouvement semblable s’était déclenché en 2024 à cause de l’adoption d’une loi « qui, en pratique, réservait une partie des emplois de la fonction publique aux familles connectées au pouvoir », rappelle Janjira Sombatpoonsiri, une spécialiste de l’activisme numérique en Asie, reprise par ce média.

L’Indonésie a aussi été gagnée par la contestation fin août 2025. En cause : les violences policières, la corruption et les privilèges de la classe politique, en particulier le projet d’allocation-logement réservée aux parlementaires et égale à dix fois le salaire minimum dans le pays.

En Serbie, l’effondrement en novembre 2024 du toit de la gare de Novi Sad, provoqué indirectement par un détournement de fonds publics, a mis le feu aux poudres. Depuis des mois, le président Aleksandar Vučić est contesté par les manifestations massives d’une jeunesse dont les perspectives sont étouffées par la corruption.

Une protestation de grande ampleur secoue aussi le Maroc depuis plusieurs semaines. Cependant, contrairement à la plupart des autres pays touchés par la révolte de la génération Z, le régime monarchique est épargné par les slogans, indique France Inter. Le collectif « Gen Z 212 » (en référence à l’indicatif téléphonique du Maroc) concentre ses critiques sur la gestion du pays, notamment sur les sommes pharaoniques englouties dans la rénovation de stades en vue de la prochaine Coupe d’Afrique des Nations et de la Coupe du monde 2030, au détriment des services publics essentiels à la population. Tout comme au Népal, où la répression a d’abord été effectuée à balles réelles, les manifestations au Maroc ont donné lieu à des affrontements violents. Au 3 octobre, plus de 400 arrestations avaient eu lieu à Tanger et à Casablanca, à l’issue d’incidents ayant provoqué des blessés et des dégâts matériels. « On retrouve finalement les mêmes slogans avec une demande d’une vie plus digne, d’une meilleure répartition des richesses, et surtout de systèmes scolaires et médicaux qui fonctionnent », analyse Mehdi Alioua, un sociologue marocain, cité par France 24.

« Ces jeunes voudraient jouer le jeu de la méritocratie, mais constatent que les dés sont pipés », poursuit ce chercheur à Sciences Po Rabat-UIR.

Un autre point commun à tous ces mouvements est le fait qu’ils soient nés et se soient diffusés sur internet. Au Maroc, la protestation a été catalysée sur Discord, où le groupe « Gen Z 212 » revendique des centaines de milliers d’utilisateurs.

Le succès dans la vie réelle de ces groupes nés en ligne repose sur une excellente maîtrise des codes d’internet par cette génération 100 % numérique : hashtags coup de poing, vidéos nourries à l’IA, montages parodiques, mais aussi détournements d’éléments de la culture pop.

Outre la traduction concrète des mouvements déjà existants, une autre question ouverte est celle de leur diffusion, notamment dans d’autres États d’Afrique où le décalage est criant entre la jeunesse de la population et l’âge très élevé des élites dirigeantes.

Un nouvel équilibre à trouver

Aux quatre coins du monde, les cartes vont-elles être rebattues au profit d’une population jeune, dynamique, mais laissée pour compte par le système politique et économique ? L’ampleur et la variété des protestations ont de quoi rendre optimiste !

Avec The Daily Digest


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A propos Colombo KPAKPABIA 1390 Articles
Colombo Kpakpabia est Directeur de publication du journal Le Temps. Il capitalise plus de 32 ans d'expérience dans la presse écrite et audiovisuelle. Colombo axe son travail sur la recherche et l'efficacité. Contact Email: [email protected]

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