Un djihadiste malien devant la Cour Pénale Internationale

La chose paraît inédite et mérite d’être marquée en lettres d’or dans les anales de la justice internationale: Ahmad Al Faqi Al Mahdi est accusé d’avoir organisé en 2012 la destruction des mausolées de la ville de Tombouctou au Mali. L’accusé, qui a plaidé coupable, est jugé depuis lundi par la Cour pénale internationale.

C’est un procès historique qui s’est ouvert ce lundi à La Haye. Le djihadiste malien Ahmad Al Faqi Al Mahdi, accusé d’avoir organisé et participé à la destruction des célèbres mausolées de Tombouctou classés au Patrimoine mondial de l’humanité, est jugé devant la Cour pénale internationale (CPI). Une première à plusieurs niveaux. En effet, ce procès devant la CPI est le premier d’un djihadiste présumé, le premier en lien avec le conflit au Mali et le premier pour destruction du patrimoine culturel. Surtout, l’accusé a plaidé coupable devant la Cour, acte inédit dans l’histoire du tribunal.

«Votre Honneur, j'ai le regret de dire que tout ce que j'ai entendu jusqu'à présent est véridique et reflète les événements», a affirmé Ahmad Al Faqi Al Mahdi, après la lecture des charges: «je plaide coupable». L'homme a également demandé pardon aux habitants de Tombouctou, la «cité aux 333 saints», et à l'ensemble du peuple malien. «Je demande leur pardon et je leur demande de me considérer comme un fils ayant égaré son chemin». Son avocat Mohamed Aouini avait annoncé la décision de son client en juin dernier lors d'une audience en présentant son client comme étant un «homme intelligent, raisonnable, un intellectuel», et un «musulman qui croit en la justice».

«Attaquer et détruire les sites et les symboles culturels et religieux de communautés est une agression sur leur histoire», a affirmé la procureur Fatou Bensouda: «aucune personne ayant détruit ce qui incarne l'âme et les racines d'un peuple ne devrait pouvoir échapper à la justice».

Une peine de 30 ans de prison

Il est accusé d’avoir «dirigé intentionnellement des attaques» contre neuf des mausolées de Tombouctou et contre la porte de la mosquée Sidi Yahia entre le 30 juin et le 11 juillet 2012. L’homme, selon l’accusation, est un membre d’Ansar Dine, organisation liée aux groupes djihadistes d’Al-Qaïda qui ont contrôlé le nord-Mali en 2012. Fervent religieux, prônant l’application de la charia, il était à la tête de la Hisbah, la brigade islamique des mœurs.

Présent sur les bords de la Mer Noire, le secrétaire général de l’Association malienne des droits de l’Homme, Bakary Camara, s’est félicité de ce procès «symbolique» et a assuré que «tout le Mali est impatient du résultat de ce procès».

En plus de l’accusation portant sur la destruction des mausolées, qui ont depuis été restaurés à l’identique, Ahmad Al Faqi Al Mahdi fait également l’objet d’une plainte pour «crimes contre l’humanité, viols, tortures et emprisonnement». Selon les textes, il encourt une peine de 30 ans de prison assortie d’une amende et une confiscation de ses biens.

Le procès doit durer environ une semaine, selon les juges. Le jugement et la condamnation seront prononcés à une date ultérieure. Ce procès apparaît comme un avertissement aux nombreux djihadistes qui continuent de sévir dans le nord du Mali, en attaquant des civils et des forces de maintien de la paix des Nations Unies.

Le Temps avec agence


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