Samedi, le Premier Ministre Moussa Mara était parti à Kidal dans le but de « consacrer la souveraineté de l’Etat malien sur tout le territoire national ». Mais cet acte de courage est en passe de se transformer en une erreur tactique. En deux jours, le MNLA – aidé par des mouvements djihadistes selon Bamako – a reconquis Kidal. Les 1500 hommes de l’armée malienne envoyés sur place ce lundi font craindre le pire.
Intervenant à la télévision malienne dans la soirée du 19 mai, le chef de l’état malien Ibrahim Boubakar Keita (IBK) a dit tout le mal qu’il pense des mouvements touaregs qui occupent le nord du pays. Pour IBK, l’attaque contre le gouvernorat intervenue pendant la visite du premier ministre avec la prise en otage de fonctionnaires maliens n’est rien d’autre qu’une « déclaration de guerre ». Il a tenu les mêmes propos belliqueux que son premier ministre et croit que le gouvernement malien est dans son droit de marcher sur Kidal. La tension entre les deux parties fait craindre des affrontements dont personne ne peut prédire les conséquences sur l’ensemble du septentrion malien.
En effet le bilan du week-end est lourd. Sur le plan humain, d’abord : une trentaine de morts, dont huit soldats et plusieurs officiels maliens. Sur le plan politique et sécuritaire, ensuite. L’élément déclencheur des violences a été la visite du premier ministre malien, Moussa Mara, à Kidal, perçue comme une provocation par la communauté touareg, et tout spécialement par son bras armé, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). La rébellion touareg qui dispose d’hommes armés dans la ville, a libéré lundi soir une trentaine de fonctionnaires qu’il retenait depuis des combats avec l’armée malienne il y a trois jours.
Depuis sa prise de fonction à la tête du Mali, IBK n’a jamais manifesté de réelle volonté à trouver une issue pacifique à la crise du nord. Les négociations conduites par Blaise Compaoré le chef de l’Etat burkinabé ont été dénoncées par Bamako qui s’était ensuite tournée vers l’Algérie et le Maroc. D’un autre côté, on prête au président malien la volonté de vouloir en découdre militairement avec les rebelles touaregs. Les dirigeants maliens qui savaient la situation fragile à Kidal, ont fini par y créer les conditions d’une confrontation avec le MNLA.
La question à poser, c’est de savoir si l’armée malienne naguère réputée faible et désorganisée est maintenant capable de combattre les hommes du désert. A-t-elle les équipements nécessaires pour faire face aux forces coalisées des mouvements touaregs et leurs alliés de l’UJAO qui l’avaient défaite au début de la crise et failli prendre Bamako, n’eut été l’intervention in extremis de l’armée française ?
Les forces françaises de l’opération Serval tout comme celles du Minusma ne sont pas intervenues lors des affrontements samedi entre l’armée malienne et les rebelles. Cette neutralité de Paris a été critiquée à Bamako, où on a toujours soutenu que c’est la France qui a permis au MNLA d’occuper Kidal, lors de son intervention au nord, lorsqu’elle n’avait pas chassé les rebelles du MNLA de la ville, comme elle l’avait fait contre d’autres mouvements armés.
Si IBK persiste en ouvrant les hostilités à Kidal, Serval et Minusma se retrouveront dans une position embarrassante, et l’on peut redouter les réactions des populations maliennes qui les avaient accueilli en libérateur, il n’y pas si longtemps.
K. Agboglati
En savoir plus sur Le Temps
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Laisser un commentaire