L’activiste et blogueur togolais Djissoro contraint à la clandestinité pour échapper à une tentative d’assassinat

Amza Inoussa, de son état civil, et connu sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme de Djissoro, est un défenseur des droits humains au Togo et père de six jeunes enfants. Il a été contraint de fuir la Mauritanie et de vivre dans la clandestinité suite à une tentative d’enlèvement à Lomé et à plusieurs arrestations à Nouakchott, manœuvres orchestrées par le régime de Faure Gnassingbé. Cette situation dramatique illustre l’escalade préoccupante de la répression extraterritoriale du gouvernement togolais à l’encontre des opposants de la diaspora.

Âgé de 48 ans, Djissoro est un militant pacifique pour la démocratie au Togo. Il a été contraint d’abandonner sa famille, comprenant son épouse et ses six enfants, dont la plus jeune n’a que trois ans, après son arrestation douloureuse en juillet dernier à Nouakchott.

Des descentes policières

En 2023, lors d’un passage à Lomé, Djissoro a été contraint de fuir le Togo en pleine nuit, passant par Cotonou avant de retourner en Mauritanie, suite à une alerte crédible concernant un plan d’enlèvement imminent. Cette alerte faisait suite à des menaces explicites, alors qu’il sensibilisait l’opinion publique sur la situation chaotique, marquée par la misère sociale et la crise politique, que traverse le Togo. De retour à Nouakchott, il a subi plusieurs descentes policières à son domicile. Conseillé par une connaissance, il a sollicité la protection du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en Mauritanie.

Entre 2023 et 2025, cet harcèlement policier s’est intensifié. Djissoro a été arrêté à plusieurs reprises par la police mauritanienne, mais sa libération a été rendue possible grâce à l’intervention du HCR lors de chaque arrestation.

Arrestation brutale

Au début de 2025, alors que des mouvements de sensibilisation prenaient forme sur les réseaux sociaux, Djissoro a été arrêté de manière brutale à son domicile à Nouakchott le 19 juillet 2025, en raison de sa participation à ces actions de sensibilisation. Ses téléphones, qu’il utilisait pour sa sensibilisation sur les réseaux sociaux, lui ont été confisqués, et il s’est vu interdire tout contact avec ses proches, notamment ses avocats, y compris ceux du HCR. Il a été conduit vers le désert, mais les policiers, sous la contestation véhémente de Djissoro, ont finalement été contraints de faire demi-tour et de l’emmener au commissariat d’Arafat. Sous la contrainte, ses empreintes digitales ont été prélevées en l’absence d’un avocat. En insistant pour connaître les raisons de son arrestation, le commissaire adjoint lui a finalement déclaré : « Nous prenons tes empreintes pour t’envoyer chez toi au Togo. » Djissoro a répondu : « Si vous voulez m’envoyer au Togo pour que l’on m’élimine, je vous prie de me tuer ici. Au moins, je ne serai pas torturé, humilié, et mon corps n’aura pas à souffrir davantage. » Ému par la gravité de ses propos, le commissaire adjoint a ordonné qu’il soit incarcéré dans un camp de détention avant qu’il ne soit libéré six jours plus tard, grâce à l’alerte donnée par des activistes politiques et les démarches entreprises par des avocats et certaines personnalités politiques.

La nuit de sa libération, un informateur masqué lui a confié par les grilles de sa cellule : « Ils vont te libérer, mais à ta sortie, cours et sors vite du pays. Ils sont déjà ici, et tu sais de qui je parle. Si tu restes, c’est ton cadavre qu’on finira par trouver. »

Le maquis par contrainte

Ces événements alarmants ont conduit Amza Inoussa à abandonner sa femme et ses enfants pour vivre dans la clandestinité depuis juillet. L’enlèvement récent et la déportation au Togo d’AZI Mensah Godfree, un compatriote togolais résidant à Bamako, constitue un précédent dangereux . Ces faits soulignent le danger permanent auquel sont confrontés les activistes politiques et les défenseurs des droits humains en Afrique.

Depuis juin 2025, le Togo connaît une vague de contestations populaires contre une modification constitutionnelle controversée permettant au président Gnassingbé de prolonger indéfiniment son mandat. La répression gouvernementale a causé au moins sept décès, des disparitions forcées, et l’arrestation de dizaines d’opposants. Cette violence s’étend désormais au-delà des frontières togolaises, ciblant spécifiquement les activistes de la diaspora.

Un appel urgent à la protection internationale

« Je suis seule avec nos enfants qui ne cessent de réclamer leur papa. Il est déchirant de vivre seule alors que mon époux est vivant et n’est pas parti à l’étranger comme c’est souvent le cas », déclare l’épouse d’Amza Inoussa, en larmes. « Mon fils n’est pas un criminel pour vivre en clandestinité, il doit être avec ses enfants en ce moment. » ajoute sa mère, le visage empreint de tristesse.

Les menaces directes contre Djissoro l’obligent à errer dans la région pour tenter de se protéger, entravant ainsi sa capacité à travailler et à s’occuper de sa famille. Il a récemment contacté des personnes ressources et des organisations de défense des droits de l’homme pour solliciter leur protection. Il est urgent qu’une solution durable soit trouvée pour garantir la sécurité de cet activiste, dévoué à la cause du changement politique au Togo.

Joséphine Bawa


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