Prison civile de Lomé : le Gouvernement se tire une balle dans le pied

« Rien de trop ! » On gagne toujours à suivre ce principe. Même dans les actes les plus malveillants. On a vu des voleurs se faire cueillir parce qu’ils voulaient trop en faire, des armées être défaites pour la même raison ; des excès de confiance mener à de lamentables fiasco. Point trop n’en faut. Les bourreaux du Togo en sont à l’apprendre.

Notre pays a eu la chance d’être de ceux qui, ayant vu l’Occident s’empêtrer piteusement dans les rets du Covid-19, ont pu en tirer des leçons. Quelques mesures rapides nous auraient suffi à contenir la pandémie au Covid-19, et éviter qu’elle ne déborde nos maigres capacités sanitaires et aboutisse à la débâcle. Poussivement, certaines de ces mesures ont fini par être prises. Si un foyer potentiel devait être vite étouffé dans l’œuf, c’est bien celui de la Prison Civile de Lomé. Bâti pour moins de 700 personnes, cet établissement, d’un autre âge, héberge plus du triple. C’est un saisissant bateau-négrier où les pensionnaires vivent à touche-touche et dorment tête-bêche. Pas besoin d’être grand-clerc ; mêmes les soudards-améliorés qui s’obstinent à régenter le Togo pouvaient imaginer qu’entré dans ce bouillon, le virus s’y répandrait comme un feu de savane. S’ils l’ignoraient, l’OMS le leur avait soufflé : élargir les prisonniers, saufs ceux condamnés pour crimes de sang ou… viol. Il n’empêche ; tout à leur haine des Togolais, qu’ils savent leur vouer un profond mépris, ils ont voulu trop en faire : frauder comme à leur habitude, donner le change à la communauté internationale… faire semblant. Des prisonniers en fin de peine furent libérés, leur liste gonflée ; des militants d’opposition et des voleurs de poules furent maintenus dans les geôles. Par pur sadisme ; sans nécessité. Ce qui devait arriver, arriva : de dizaines de tels prisonniers se retrouvent infectés ; des centaines peut-être.

Alors qu’ils peinaient déjà à réussir le plus facile, voici nos soudards se compliquant la tâche d’un problème qu’ils auraient pu, qu’ils auraient dû éviter. A l’heure où tous les gouvernements du monde sont sous scrutation, c’est se tirer une balle dans le pied. Nombre des derniers cas-confirmés sont de ces prisonniers ; on peut craindre qu’ils fassent le gros des prochaines victimes du virus. Tout ça pour une pincée de haine de plus, un supplément gratuit de violence. Une baïonnette, ça sert à tout ; sauf à y poser son fondement. Alors, à trop vouloir s’appuyer dessus, on finit par s’y empaler.

Téo Abelson


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A propos Komi Dovlovi 1148 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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