Faune : Peine de prison avec sursis pour les détenus

Le verdict de la Faune de l’Oti est tombé ce 3 mars à Dapaong : une peine d’emprisonnement de 48 mois dont 33 mois de sursis pour les cinq détenus.

Jugement sévère. Le tribunal de Mango a eu la main lourde ce matin en prononçant un verdict sans compassion pour les cinq jeunes détenus dans le cadre du  procès de la faune de la vallée de l’Oti.

Le président du tribunal, Kolani toitoka, a presque abondé dans le sens du réquisitoire du procureur, qui a requis 40 mois de prison ferme dont 20 de sursis. Le tribunal est allé plus loin en prononçant une condamnation de 15 mois de prison ferme et 33 mois de sursis contre Kakanrafou  Mamah, Soulemane Rabiou, Cherigneme Abdoulaye,  Naba Ousmane, Aoudou Arimiyao.

.Les détenus ont tout de même recouvré la liberté  dans la journée pour avoir purgé 15 mois à la prison de Dapaong. Le verdict a été accueilli avec soulagement par les populations de la zone.

Quatre des détenus écoutant le verdict ce matin à Dapaong

Le procès a été dépaysé à Dapaong, en dépit du déroulement des faits à Mango; le pouvoir craint des perturbations en raison des tensions autour du procès. Il y avait d’ailleurs une  forte présence de policiers et de gendarmes durant le déroulement. Même constat ce matin à l’énoncé du verdict, un important dispositif sécuritaire s’imposait aux familles et sympathisants des détenus.

En 2015, les populations de l’Oti ont manifesté contre la réquisition par le gouvernement des zones de culture situées entre l’Oti et le Kpendjal en vue de la  réinstallation d’un domaine réservé de faune sauvage. La zone bénéficie d’un climat subsoudano-sahélien.

La réinstallation devrait nécessairement conduire à des déplacements de certaines populations. Les révoltes paysannes transformées en jacqueries ont été sévèrement réprimées dans le sang: 7 morts dans la population. Un commandant d’une unité de police venue de Dapaong a également été tué par un manifestant. La mort de ce commissaire est  l’une des raisons du jugement de ces jeunes mais aussi de la réhabilitation de l’autorité d’un Etat désavoué.

Politique de faune au détriment d’une politique agricole

La réhabilitation des aires dites « protégées », est une résurgence des politiques environnementales désastreuses en termes de droits humains pendant la dictature Eyadema. Les bêtes étaient favorisées au détriment des êtres humains, les populations vivant dans cette zone fortement militarisée étaient victimes des exactions du tristement célèbre commandant Yoma Djoua.

Aussi, à l’époque, l’extension des domaines reservés occuperait-elle une superficie égale à 12% de l’ensemble du pays – chiffre le plus élevé en Afrique. En dépit des  félicitations extérieures pour sa politique de protection de la faune sauvage, les populations payaient le prix fort.

Par conséquent, la reprise de cette politique conduite sans communication et étude préalable de la sociologie et de l’économie de la vallée de l’Oti (plus de 300 mille habitants) indique l’éloignement de la classe dirigeante des préoccupations basiques des populations. Croire que le tourisme animalier pourrait améliorer le quotidien de ces populations rurales, c’est faire preuve de cécité.

La vallée de l’Oti est une zone agricole propice aux cultures du riz et maraîchères dont la mise en valeur pourrait alimenter tout le Togo d’après des études.

Cependant cette région détient le record du taux de pauvreté au Togo avec 96% de pauvres. Plusieurs familles ne disposent pas de 1000 FCFA par jour pour se nourir dans le Kpendjal (140 à 150.000 habts). Et on constate une aggravation de la situation malgré les politiques de développement. Zone fortement arriérée, les paysans rencontrent des difficultés pour commercialiser les produits agricoles, surtout le maïs.

A propos Komi Dovlovi 1013 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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