France : François Bayrou soutient Emmanuel Macron

,Le président du Modem, François Bayrou, apporte un soutien de poids à Emmanuel Macron, un appui qui peut muer l’outsider en favori de la présidentielle.

Coup de théâtre. Grand moment de politique en France. Adrénaline, incertitude, passion, bouleversement, émotion. La présidentielle française 2017 réserve des bouleversements en tout genre. Cette après-midi, le président du Modem, François Bayrou, le faiseur de roi qui ne dit pas son nom, a choisi son camp par la proposition d’une « alliance » à Emmanuel Macron.  Une aubaine pour le  presque  quadra président du mouvement En Marche !

Après analyse de la situation d’une  classe politique « décomposée », du déclassement d’un pays après dix ans de sarkozysme et de hollandisme, François Bayrou veut tourner  définitivement la page  par une refondation de la vie politique française.

«J’ai examiné depuis plusieurs semaines tous les éléments qui permettent de juger. Je veux vous dire à quel point la gravité de la situation m’a frappé. Jamais dans les 50 dernières années la démocratie en France n’a connu une situation aussi décomposée. Le bilan du gouvernement sortant est tel que les primaires de la gauche ont choisi un opposant déterminé à la politique suivie depuis le début du quinquennat», a-t-il déclaré.

Au regard de l’offre politique et la demande renouvelée des Français d’en bas  d’un renouveau du théâtre politique, François Bayrou fait un choix conditionné d’Emmanuel  Macron.  «J’ai décidé de faire à Emmanuel Macron une offre d’alliance», déclare-t-il.

 

Une alliance de raison pour moraliser  la vie publique

Le choix de François Bayrou est dicté par l’actualité, les éclaboussures des scandales à répétition sur les candidats François Fillon et Marine Le Pen. Le président du Modem est sidéré par la normalisation de la fange et le risque du « tout-pourri » qui peut entacher toute la classe politique et la décrédibiliser.

Le soutien affiché de la droite toute alignée derrière Fillon, l’indifférence des sympathisants d’extrême-droite à l’égard des accusations d’emplois présumés fictifs  de Marine Le Pen, constituent l’expression d’un pays qui se décompose, que la fange n’effraie guère. Le risque de voir l’extrême droite entrer à l’Elysée dans ces conditions en est d’autant plus grande.

Je demande expressément que le programme présenté par Macron comporte une loi de moralisation de la vie publique, notamment sur la lutte contre les conflits d’intérêt. Je refuse, comme j’ai refusé toute ma vie, que de grands intérêts prennent la vie publique en otage. Je ne céderai rien sur la séparation de la politique et de l’argent, indique François Bayrou.

Mais le président du Modem en appelle à un bouleversement général, à une recomposition du théâtre politique, qui passe par la gestion commune et consensuelle des affaires publiques en favorisant par un système électoral pondéré-la proportionnelle- l’implication de toutes les forces politiques positives. En clair, François Bayrou qui a un œil sur l’Allemagne et les pays nordiques, demande de but en blanc la concrétisation de la social-démocratie en France.

Je crois que cette alliance peut être une entente d’homme à homme, de courant à courant. La confrontation de ces visions et de ces idées, l’influence de l’une sur l’autre (…) apportera à la campagne électorale. Une majorité, cela se construit à partir d’histoires différentes, de familles politiques différentes, à condition qu’elles soient respectées (…) avec toutes leurs identités, leurs armes et leurs bagages », ajoute le maire de Pau.

François Bayrou, faiseur de roi

Mardi 21 février, les sondages étaient plus moins favorables à Emmanuel Macron. S’il y a stabilité chez l’égérie du Front national, Marine Le Pen (26%), François Fillon remonte quelque d’un demi avec 19%, alors que la situation demeure étale chez Macron, également 19%.

Cette remontée de Fillon depuis quelques jours contrairement à la stabilité de Marcon est un signe de la lassitude de l’opinion. D’autant plus qu’Emmanuel Macron, sans prendre de gant, a exprimé certaines vérités à l’égard du passé français qui ont fortement déplu à une forte partie de son électorat éclaté. Une polémique qui ne l’a pas aidé, loin de là, même si elle a montré la stature d’homme d’Etat qu’il commence à étrenner.

Le soutien de François Bayrou, 5% dans les sondages sans annonce de candidature, est un poids énorme dans la balance. Il pourra galvaniser cet électorat du centre hésitant à suivre Fillon et ses casseroles. Il rassure également cet électorat de la gauche socialiste et écologiste qui ne se retrouvent nullement dans le programme de Benoît Hamon.

Un Hamon affaibli au sein de son parti, un Mélenchon quelque peu ringard louvoyant  entre Marx,  Keynes, écologie et rupture avec l’Union Européenne,  c’est une gauche déglinguée qui risque finalement de profiter à Emmanuel Macron.

En 2007, Bayrou a favorisé Sarkozy en refusant l’alliance de Segolène Royale. En 2012, il a fait échouer le même Sarkozy en apportant son soutien à François Hollande. Un soutien dont Hollande n’a pas su cultiver en faisant entrer Bayrou et le centre au gouvernement. En choisissant très tôt Macron, le grand électeur met sous éteignoir la remontée de François Fillon, et permet en même temps une centripétence des forces politiques.

En dernière analyse, contre toute attente, Emmanuel Macron l’oustsider monte en puissance et sera probablement le vainqueur de la présidentielle en France. A moins d’une révélation d’un scandale…

 

A propos Komi Dovlovi 1013 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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