Selon un de ses avocats, Kpatcha Gnassingbé demande un règlement familial à son affaire

 

kpatcha perso

Un semblant de rebondissement dans l’affaire Kpatcha Gnassingbé & co-accusés. Me Benoît Afangbedji, un des avocats du demi-frère de Faure Gnassingbé, a publié sur sa page Facebook, une annonce de Kpatcha Gnassingbé sollicitant le chef canton de Pya – village d’origine de la famille au pouvoir- pour « un  règlement familial » de l’affaire.

DU NOUVEAU DANS L’AFFAIRE KPATCHA GNASSINGBE ET SES CO-CONDAMNES
Je viens d’être chargé par Monsieur KPATCHA GNASSINGBE pour porter à la connaissance des populations togolaises, que dans un souci d’apaisement et de réconciliation nationale, un règlement familial de son affaire s’impose. Et ainsi Madame le Chef canton de Pya, KPIKI SAMAN a été sollicitée à cette fin, écrit Me Benoît Afangbedji sur son mur. 

La publicité donnée à cette initiative du prisonnier demi-frère du chef de l’Etat brouille quelque peu les cartes, quand on pense qu’elle devrait être menée avec tact et diplomatie.  Me Benoît Afangbedji n’étant pas le seul avocat de l’ancien ministre de la Défense, difficile de savoir si cette façon de communiquer a été décidée par le collectif  d’avocats. Mais le trublion avocat aimant faire du bling-bling,  il ne serait pas surprenant qu’il ait pris tout seul la décision de l’annoncer via les réseaux sociaux et les radios privées.

N’empêche, le timing de cette publication à l’approche de la présidentielle 2015, relève d’un grand intérêt, ce qui peut expliquer la décision de faire du buzz. C’est dire que l’affaire Kpatcha Gnassingbé constitue une épine dans le pied de Faure Gnassingbé, quelque peu gêné aux entournures.

Sans considérer le volet judiciaire de l’affaire,  pour avoir emprisonné son frère, le président est vu dans sa région d’origine comme un homme sans cœur, un semeur de zizanie dans la famille, contrairement à son père, un rassembleur. Une situation qui pourrait le déranger dans la quête des suffrages des électeurs de la Kozah. A noter toutefois que l’arrestation et la détention, en 2009, de Kpatcha Gnassingbé, de son demi-frère Essolizam, ainsi que des co-accusés, n’avait pas empêché Faure Gnassingbé de gagner la présidentielle 2010 avec un fort pourcentage dans la  Kozah.

La Haute Cour de justice de la CEDEAO a tranché en faveur de Kpatcha Gnassingbé

Cependant c’est surtout le volet judiciaire de l’affaire qui est fâcheuse pour le gouvernement togolais. La Haute Cour de justice a tranché en faveur de Kpatcha Gnassingbé & co-accusés en condamnant l’Etat togolais à payer les dédommagements des condamnés et a surtout précisé que leurs droits ont été violés.

Me Gil-Benoît Afangbédji, l'un des avocats de Kpatcha Gnassingbé
Me Gil-Benoît Afangbédji, l’un des avocats de Kpatcha Gnassingbé

Le 17 février dernier, lors de la session délocalisée  de la Haute Cour de Justice de la CEDEAO à Lomé, sa Présidente, la Togolaise Awa Nana,  a tenu à apporter un éclairage quant au non-dédommagement des condamnés.

Pour Awa Nana, l’organisme de mise en œuvre de cette décision c’est désormais l’Etat :

Une fois la décision rendue, l’organe d’exécution revient à l’Etat membre. Donc c’est ici que vous devez interpeller l’agent d’exécution par exemple dans l’affaire Kpatcha ou dans l’affaire des députés et dans toutes les affaires qui concernent le Togo. Donc c’est à l’autorité en charge d’exécuter cette décision qu’il faut poser la question. De l’autre côté, c’est peut-être aussi à la partie gagnante de faire connaître à la Cour que la décision n’a pas été exécutée, dixit l’ancienne présidente de la CENI lors de la présidentielle de juin 1998.

C’est donc Faure Gnassingbé qui refuse d’exécuter une décision d’une juridiction communautaire, qui s’impose normalement aux tribunaux togolais, au risque d’affaiblir une institution louée pour son impressionnant travail en matière des droits.

Selon Djovi Galli, un des avocats de Kpatcha Gnassingbé, les décisions de la Cour de justice de la Cédéao ne sont pas facultatives :

Les décisions de la Cour de justice de la Cédéao ne constituent pas une faculté pour les Etats membres, mais une obligation en vertu de leurs engagements internationaux, et qui plus est de règlement de la Cour dispose de manière claire que les décisions sont obligatoires le jour de leur prononcé.

Ce à quoi Me Ohini Kwao Sanvee, un des avocats de l’Etat togolais, donne son accord :

L‘Etat togolais va exécuter cette décision.

Comment comprendre alors que les personnes soient toujours détenues ?  La raison d’Etat ?  Possible, au regard des rivalités entre le chef de l’Etat et son frère au lendemain de leur prise de pouvoir sanglante. Il s’ensuit alors que c’est Faure Gnassingbé qui maintient son frère dans les liens de la prison, au mépris du droit. Kpatcha Gnassingbé a donc raison de dire que le différent est d’ordre familial et d’appeler  ainsi l’intercession du chef canton de Pya.

Kpatcha Gnassingbé a été accusé dans une ténébreuse affaire d’atteinte à la sécurité de l’Etat. Il a été arrêté en avril 2009 aux portes de l’Ambassade des Etats-Unis. 32 personnes étaient inculpées dans cette affaire, mais 23 ont été relâchées et 9 autres condamnées en 2011 à des peines de prison sévères allant jusqu’à 20 ans de réclusion,  aux termes d’un procès jugé inique par la presse. Les principaux accusés avaient fait part des aveux extorquées sous la torture à l’Agence nationale du renseignement (ANR). Un rapport de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) a reconnu l’existence de ces actes de torture de la part d’éléments des services de renseignement proches du chef de l’Etat. Ces derniers n’ont jamais été condamnés.

A propos Komi Dovlovi 1013 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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