Le PDP, « le parti à abattre » dans la région de la Kara

Le Professeur Bassabi Kagbara n’y va pas par quatre chemins : son Parti démocratique panafricain est considéré désormais comme le parti à abattre dans la région de la Kara. En témoigne l’arrestation et la détention du député PDP de Dankpen, un leader qui sait mobiliser les masses de sa préfecture par son discours anti-système. M. Targone Sambrini Wakin est accusé de « troubles à l’ordre public, violences volontaires, homicide volontaire, complicité d’homicide volontaire, destructions volontaires par incendie, complicité de destructions volontaires par incendie, vol qualifié et complicité de vol qualifié ». Ce qui sous-entend que s’il n’est pas l’auteur, il aurait pu être au moins le complice ! 

Depuis la levée de l’immunité du député Targone Sambrini Wakin et son arrestation par la gendarmerie, les langues se délient, le Nord, considéré comme fief du pouvoir, est une zone difficile pour les partis de l’opposition, surtout quand ceux-ci sont dirigés par des personnalités locales.

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Harcèlements, intimidations, affectations abusives, chasses à l’homme, violences avec voies de fait, sont le lot quotidien que vivent les militants et sympathisants des partis de l’opposition au Nord.

Le PDP est dans la ligne de mire des mandarins locaux depuis son triomphe sur le RPT dans le Dankpen 2013. Pour M. Bassabi Kagbara, les chefs d’accusation fantaisistes contre M. Targone constituent la preuve d’une cabale pour affaiblir le PDP.

On lui reproche même des faits qui ont eu lieu bien avant l’arrivée du PDP dans le Dankpen. Imaginez qu’on lui reproche même d’autres faits dont le véritable auteur a été depuis identifié, jugé et puni. Vous voyez que c’est un dossier cousu de fil blanc. On a toujours tout fait pour étouffer le PDP dans le Nord. Et la dernière tournée de remerciement que le député a menée [après son élection à la députation, ndlr] dans toute la préfecture de Dankpen, a été très mal prise par nos détracteurs, affirme M. Kagbara.

Et il ajoute plus loin :

Le scénario Targone donne aujourd’hui la preuve à l’opinion nationale et internationale de tous les affres, les harcèlements et chasses à l’homme dont nos militants sont constamment victimes dans le Nord du pays.

C’est la preuve que le régime ne veut pas de débats contradictoires, surtout dans le Nord du pays. De Dankpen à la Binah, en passant par Sotouboua, Doufelgou, Bassar et autres, nos militants sont constamment objet d’affectations punitives, violences, arrestations arbitraires, provocations et autres, au point qu’on en déduit aujourd’hui que le PDP est devenu pour UNIR l’adversaire à abattre dans cette région.

Étouffer l’opposition

Par le passé, le pouvoir devrait se battre contre des partis de l’opposition dirigés par des personnalités du Sud, et cette situation justifiait quelque peu à ses yeux le discours ethno-régionaliste de « ne pas donner le pouvoir aux gens du Sud ». Depuis quelques temps la donne à changer, avec l’affirmation et la montée en puissance de leaders politiques  ressortissants de la région de la Kara.  Avec le Parti socialiste du Renouveau (PSR) et le PDP, la région de la Kara compte des dirigeants qui, sur le plan de leurs parcours professionnels, ne doivent rien au pouvoir en place, contrairement à la plupart des cadres du RPT ou d’UNIR. Et en plus, ils n’ont rien à envier à l’establishment du régime, et contestent ouvertement la gestion du pays, tant au niveau local que national. Le mythe du Nord chasse-gardée des Gnassingbé est en train d’être secoué dans ses fondements. L’opposition a ainsi arraché des sièges aux législatives dernières : le PDP a arraché un siège dans le Dankpen ; Sursaut Togo de Kofi Yamgnane en a pris un dans le Bassar, tandis que l’ADDI a arraché des sièges dans le Tône le Tandjouaré. Une situation inédite,   aux législatives 2007, la vague déferlante du RPT ne s’est arrêté qu’à Sokodé.

Une érosion de sa base électorale que le pouvoir ne supporte plus, d’où les exactions et autres efforts pour étouffer l’opposition.

Plusieurs fois, nous avons saisi les autorités du pays sur ces questions, mais la dernière sortie du préfet montre que le pouvoir n’est pas prêt à chercher la paix politique pour notre pays.

Il me tient de rappeler que déjà en 2011, le Haut commissariat des nations unies aux droits de l’homme (HCDH) et d’autres organisations de défense des droits de l’homme, ont eu à constater sur le terrain les chantages, les intimidations, les violences et autres voies de fait, dont sont victimes quotidiennement les militants du PDP dans cette préfecture, de la part du préfet Dadja Maganawé.

Les autorités administratives sont également témoin. On s’étonne que ce préfet soit toujours maintenu à son poste depuis 13 ans.

En ce qui concerne le PDP, la paix dans le Dankpen passe par le limogeage pur et simple de Dadja Maganawé, qui d’ailleurs joue au pyromane dans la gestion de la transhumance, en instrumentalisant les bouviers peulhs.  

A l’orée de la présidentielle, le pouvoir met a recours à ses vieilles méthodes héritées du RPT. Le nord, considéré comme la chasse gardée, et réservoir de voix abusé et corvéable à merci, doit être vide de ses opposants.

 

A propos Komi Dovlovi 1013 Articles
Journaliste chroniqueur, Komi Dovlovi collabore au journal Le Temps depuis sa création en 1999. Il s'occupe de politique et d'actualité africaine. Son travail est axé sur la recherche et l'analyse, en conjonction avec les grands  développements au Togo et sur le continent.

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